La catastrophe RENIR confirmée par la VG
Un milliard $ a été injecté dans un projet de radiocommunication défaillant qui est boudé par les services d’urgence
La vérificatrice générale frappe un dur coup sur le controversé système de communication d’urgence qui a déjà coûté plus d’un milliard $ à Québec, affirmant qu’il fonctionne mal et qu’il est rejeté par les policiers et les ambulanciers.
Dépassements de coût monstres et système déficient : plus de 15 ans après son démarrage, le Réseau national intégré de radiocommunication (RENIR) n’a jamais atteint sa cible. Il est d’ailleurs boudé par 78 % des services d’urgence.
Le modèle d’affaires expose aussi le gouvernement à un risque de dépendance à l’égard d’un seul fournisseur, soit l’entreprise Motorola qui a empoché 232 M$ en développant le réseau et en obtenant 84 % de l’argent des contrats d’achat d’équipements.
En publiant ce rapport, la vérificatrice donne raison à notre Bureau d’enquête qui a sonné l’alarme depuis 2014 dans une série de reportages (
« En 2020, force est de constater que le
RENIR n’est pas devenu le réseau national de radiocommunication qu’il devait être, comme cela était prévu au début du projet », mentionne la vérificatrice générale, Guylaine Leclerc.
Pourtant, Québec a toujours défendu RENIR et maintenu qu’il s’agissait d’un actif « robuste ».
INCIDENTS DE COMMUNICATION
L’outil informatique devait permettre à toutes les unités liées à la sécurité publique, comme la Sûreté du Québec et les ambulanciers, de communiquer facilement, peu importe l’endroit ( voir encadré).
Or, les services d’urgence n’ont pas été consultés lors du développement du réseau, ce qui a créé un décalage important entre les besoins et les services obtenus.
Encore aujourd’hui, le système connaît fréquemment des interférences, des interruptions de service et des délais jugés trop longs pour l’obtention d’une communication d’urgence.
Certaines fréquences ne pénètrent pas à l’intérieur des bâtiments, comme les écoles, les hôpitaux et les centres commerciaux.
La vérificatrice signale qu’il y a eu plus de 16 000 incidents de communication.
« C’est un projet qui a été difficile. Il y a une bonne partie de la SQ qui ne peut pas l’utiliser actuellement ou qui n’est pas en mesure de l’utiliser », a mentionné la VG.
Le ministre de la Transformation numérique, Éric
Caire, a admis en entrevue qu’il y avait une « rupture de confiance » envers RENIR, mais que le gouvernement travaille à renverser la tendance avec la SQ.
PLUS D’UN MILLIARD $
Toutefois, RENIR est en voie de devenir le plus gros bordel informatique de l’histoire du Québec, avec des sommes qui dépasseront les 1,3 milliard $ avant même d’être fonctionnel et utilisé.
Pour le moment, RENIR a nécessité des investissements de base de plus de 350 millions de dollars, soit plus du double que ce qui avait initialement été autorisé.
Il faut ajouter à cette somme l’argent lié à l’exploitation du RENIR qui coûte plus de 80 millions $ par année, contrairement aux 24 M$ prévus.
Puis, le gouvernement continue de payer des millions $ pour faire fonctionner de vieux systèmes parallèles pour ceux qui rejettent RENIR.
Parmi ces contrats, une somme de 1,5 M$ est versée de gré à gré à Bell chaque mois.
Le rapport de la vérificatrice indique finalement que le RENIR coûtera encore entre 36 M$ et 108 M$ d’ici 2024, afin d’améliorer la couverture en milieux urbains.
Le ministre Éric Caire, avait pourtant promis en entrevue en décembre 2018 que le RENIR serait complètement déployé et fonctionnel cette année.
« PITOYABLE »
« La logique comptable du gouvernement dans ce projet est pitoyable », a critiqué la présidente du Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ), Line Lamarre.