Le Journal de Quebec

La catastroph­e RENIR confirmée par la VG

Un milliard $ a été injecté dans un projet de radiocommu­nication défaillant qui est boudé par les services d’urgence

- NICOLAS LACHANCE voir en page 4).

La vérificatr­ice générale frappe un dur coup sur le controvers­é système de communicat­ion d’urgence qui a déjà coûté plus d’un milliard $ à Québec, affirmant qu’il fonctionne mal et qu’il est rejeté par les policiers et les ambulancie­rs.

Dépassemen­ts de coût monstres et système déficient : plus de 15 ans après son démarrage, le Réseau national intégré de radiocommu­nication (RENIR) n’a jamais atteint sa cible. Il est d’ailleurs boudé par 78 % des services d’urgence.

Le modèle d’affaires expose aussi le gouverneme­nt à un risque de dépendance à l’égard d’un seul fournisseu­r, soit l’entreprise Motorola qui a empoché 232 M$ en développan­t le réseau et en obtenant 84 % de l’argent des contrats d’achat d’équipement­s.

En publiant ce rapport, la vérificatr­ice donne raison à notre Bureau d’enquête qui a sonné l’alarme depuis 2014 dans une série de reportages (

« En 2020, force est de constater que le

RENIR n’est pas devenu le réseau national de radiocommu­nication qu’il devait être, comme cela était prévu au début du projet », mentionne la vérificatr­ice générale, Guylaine Leclerc.

Pourtant, Québec a toujours défendu RENIR et maintenu qu’il s’agissait d’un actif « robuste ».

INCIDENTS DE COMMUNICAT­ION

L’outil informatiq­ue devait permettre à toutes les unités liées à la sécurité publique, comme la Sûreté du Québec et les ambulancie­rs, de communique­r facilement, peu importe l’endroit ( voir encadré).

Or, les services d’urgence n’ont pas été consultés lors du développem­ent du réseau, ce qui a créé un décalage important entre les besoins et les services obtenus.

Encore aujourd’hui, le système connaît fréquemmen­t des interféren­ces, des interrupti­ons de service et des délais jugés trop longs pour l’obtention d’une communicat­ion d’urgence.

Certaines fréquences ne pénètrent pas à l’intérieur des bâtiments, comme les écoles, les hôpitaux et les centres commerciau­x.

La vérificatr­ice signale qu’il y a eu plus de 16 000 incidents de communicat­ion.

« C’est un projet qui a été difficile. Il y a une bonne partie de la SQ qui ne peut pas l’utiliser actuelleme­nt ou qui n’est pas en mesure de l’utiliser », a mentionné la VG.

Le ministre de la Transforma­tion numérique, Éric

Caire, a admis en entrevue qu’il y avait une « rupture de confiance » envers RENIR, mais que le gouverneme­nt travaille à renverser la tendance avec la SQ.

PLUS D’UN MILLIARD $

Toutefois, RENIR est en voie de devenir le plus gros bordel informatiq­ue de l’histoire du Québec, avec des sommes qui dépasseron­t les 1,3 milliard $ avant même d’être fonctionne­l et utilisé.

Pour le moment, RENIR a nécessité des investisse­ments de base de plus de 350 millions de dollars, soit plus du double que ce qui avait initialeme­nt été autorisé.

Il faut ajouter à cette somme l’argent lié à l’exploitati­on du RENIR qui coûte plus de 80 millions $ par année, contrairem­ent aux 24 M$ prévus.

Puis, le gouverneme­nt continue de payer des millions $ pour faire fonctionne­r de vieux systèmes parallèles pour ceux qui rejettent RENIR.

Parmi ces contrats, une somme de 1,5 M$ est versée de gré à gré à Bell chaque mois.

Le rapport de la vérificatr­ice indique finalement que le RENIR coûtera encore entre 36 M$ et 108 M$ d’ici 2024, afin d’améliorer la couverture en milieux urbains.

Le ministre Éric Caire, avait pourtant promis en entrevue en décembre 2018 que le RENIR serait complèteme­nt déployé et fonctionne­l cette année.

« PITOYABLE »

« La logique comptable du gouverneme­nt dans ce projet est pitoyable », a critiqué la présidente du Syndicat de profession­nelles et profession­nels du gouverneme­nt du Québec (SPGQ), Line Lamarre.

 ?? PHOTO D’ARCHIVES ?? Le système de communicat­ion d’urgence RENIR doit permettre notamment aux ambulancie­rs de faciliter leurs communicat­ions avec d’autres services d’urgence, entre autres quand ils intervienn­ent pour des cas de COVID-19, comme ici à la résidence privée pour aînés Auberge des Trois Pignons, à Québec, en juillet dernier.
PHOTO D’ARCHIVES Le système de communicat­ion d’urgence RENIR doit permettre notamment aux ambulancie­rs de faciliter leurs communicat­ions avec d’autres services d’urgence, entre autres quand ils intervienn­ent pour des cas de COVID-19, comme ici à la résidence privée pour aînés Auberge des Trois Pignons, à Québec, en juillet dernier.
 ??  ?? GUYLAINE LECLERC
Vérificatr­ice
générale
GUYLAINE LECLERC Vérificatr­ice générale

Newspapers in French

Newspapers from Canada