L’étude sur la colchicine traîne de la patte et peine toujours à trouver ses cobayes
Hautement financée par Québec, l’étude COLCORONA de l’institut de cardiologie de Montréal peine à boucler le recrutement de cobayes afin de tester efficacement les effets de la colchicine sur les malades de la COVID-19.
Sept mois après le début d’une vaste étude sur la colchicine, un médicament déjà existant qui pourrait réduire les risques de complications liées à la COVID-19, l’objectif de recruter 6000 participants n’a toujours pas été atteint.
« L’obtention des résultats dépend du recrutement. Nous sommes toujours à recruter des participants afin d’atteindre la masse critique permettant de faire la seconde analyse intérimaire de l’étude », a admis Camille Turbide, qui gère les communications pour le groupe de recherche.
Le responsable du projet à l’institut de cardiologie, le Dr Jean-claude Tardif, soutenait pourtant en juillet dernier que les résultats seraient connus de façon définitive d’ici la fin de l’été et que la colchicine pourrait être rapidement administrée dans les jours suivant le rapport final.
Au coeur de l’automne et de la deuxième vague, les résultats se font toujours attendre.
QUÉBEC IMPLIQUÉ
Fondant beaucoup d’espoir sur cette étude, le ministère de la Santé a octroyé une subvention de 5,3 millions $ à l’équipe du Dr Jean-claude Tardif.
« [Avec] 6000 patients, et ça va rondement, on pense avoir des nouvelles à l’intérieur de trois mois », avait déclaré, le 27 mars dernier, l’ex-ministre de la Santé, Danielle Mccann, ajoutant que Québec suivait cette recherche « de très près ».
Le ministère de la Santé soutient maintenant qu’il est beaucoup trop tôt pour dévoiler quelque résultat que ce soit.
« Il faut d’abord que le recrutement et la collecte de données soient terminés. Par la suite, il y a des étapes de traitement des données et d’analyse, a indiqué le porte-parole du MSSS, Robert Maranda. Les résultats préliminaires d’une étude scientifique ne sont jamais partagés avant la fin de l’étude. »
DE DÉLAI EN DÉLAI
Au début de la pandémie, le Dr JeanClaude Tardif avait dit au Journal que les résultats de l’étude étaient attendus pour le mois de juin.
« On devrait avoir les premiers résultats vers la fin de juin. Et là, on verra s’ils sont intérimaires ou finaux », promettait-il.
Les résultats devaient indiquer si la colchicine allait être efficace pour combattre la tempête inflammatoire qui touche plusieurs patients atteints de la COVID-19.
Le comité de révision de l’étude, qui détient des résultats préliminaires, a bel et bien donné en juin dernier son aval pour que l’étude puisse suivre son cours.
Rien sur l’efficacité de la colchicine n’a toutefois été dévoilé.
Le recrutement difficile a compliqué la suite de l’étude. Le groupe a dû conclure des ententes avec de nombreux pays afin de trouver des candidats.
Le groupe de recherche a refusé de préciser le nombre de participants manquants pour conclure l’étude.
« Nous serons heureux de vous faire part des résultats lorsque l’étude sera complétée », a seulement indiqué Mme Camille Turbide.
L’étude COLCORONA est à double insu. Certains reçoivent le médicament et d’autres un placebo. Ni les patients ni les chercheurs ne sont au courant des résultats pour le moment.
L’institut national d’excellence en santé et services sociaux juge toujours prématuré, en dehors d’un protocole de recherche, d’administrer de la colchicine à des patients ayant un diagnostic confirmé ou suspecté de COVID-19.
En 2017, l’institut national de la santé publique a soulevé une augmentation du nombre d’appels concernant des intoxications probables par la colchicine au Centre antipoison du Québec (CAPQ). L’hypothèse soulevée ici est que l’augmentation de ces appels serait attribuable à un plus grand usage de ce médicament. « Bien que les intoxications par la colchicine soient relativement rares, elles peuvent être fatales. Malheureusement, il n’existe actuellement aucun antidote pour les traiter », souligne L’INSPQ.