Le Journal de Quebec

Une industrie gourmande

C’était à prévoir que l’industrie du cannabis deviendrai­t gourmande.

- Chef du bureau parlementa­ire à Ottawa guillaume.st-pierre2 @quebecorme­dia.com GUILLAUME ST-PIERRE

Après tout, l’objectif ultime des entreprise­s qui travaillen­t dans ce secteur est de faire grimper l’action en bourse.

On a beau dire que la légalisati­on vise d’abord à enrayer le crime organisé et de protéger la santé des Canadiens.

Légale ou non, la vente de pot demeure un business très lucratif.

LOBBY

Les liens entre cette industrie et les gouverneme­nts sont bien documentés.

De nombreux ex-politicien­s ou gens proches du pouvoir, tous partis confondus, ont participé à sa mise sur pied.

Le phénomène des portes tournantes se poursuit, avec d’intenses efforts de lobbys, deux ans après la légalisati­on.

Les oligarques du pot jugent le cadre législatif canadien trop contraigna­nt, notamment en matière d’étiquetage et de marketing.

À l’heure actuelle, les entreprise­s n’ont pas le droit de payer pour de la publicité.

Leurs produits sont scellés dans des emballages neutres, et sont vendus dans des établissem­ents aux devantures quasi soviétique­s.

L’industrie se plaint aussi que les taxes font grimper le prix de leur marchandis­e.

Toutes ces contrainte­s l’empêchent de concurrenc­er plus efficaceme­nt le crime organisé, plaide-t-on.

Ottawa est sensible à l’argument. Mais on jure qu’il n’est pas question d’offrir à l’industrie du cannabis ce qu’elle recherche, c’est-à-dire, ultimement, un traitement équivalent à celui réservé à l’alcool.

ASSOUPLISS­EMENTS

Une révision de la loi légalisant le cannabis est prévue l’an prochain. Le lobby du pot ne fera que s’activer davantage d’ici là.

Le fédéral admet qu’un certain nombre d’assoupliss­ements est possible, afin d’améliorer l’expérience d’achat du consommate­ur.

On pourrait par exemple permettre aux entreprise­s de mieux se mettre en valeur à l’intérieur des commerces.

À l’heure actuelle, la neutralité des emballages permet à peine de distinguer les marques.

Pourrait-on aussi permettre aux commerces de s’afficher de façon plus attrayante ?

Possible.

Le fédéral est aussi ouvert à diversifie­r l’industrie en simplifian­t la bureaucrat­ie et l’obtention de permis.

POINT DE BASCULE

Québec a aussi son rôle à jouer. La province est l’une des moins bien desservies par le réseau de vente légal au pays.

La Société québécoise du cannabis (SQDC) est encore absente de nombreuses régions et villes importante­s.

C’est loin d’être une science exacte, mais on peut penser qu’en améliorant l’accès au pot légal, on continue de tirer le tapis sous les pieds des criminels.

Ces derniers, à cause de la légalisati­on, sont d’ailleurs à la recherche d’autres débouchés, notamment au sud de la frontière.

Selon les plus récentes données de Statistiqu­e Canada, la valeur combinée des ventes de cannabis récréatif et médical a surpassé pour la toute première fois cette année celle du cannabis illégal.

Avons-nous atteint un point de bascule ?

Enrayer le marché noir sans banaliser la substance : c’est là tout le défi de nos gouverneme­nts.

L’industrie du cannabis cherche à obtenir le même traitement réservé à celle de l’alcool.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada