Le Journal de Quebec

La détention de James Richard Cross

-

Les premiers jours, je suis celle qui parle avec monsieur Cross. C’est mon rôle. Nous avions décidé qu’une voix de femme serait plus apaisante. Il me revient donc de le tranquilli­ser.

Je lui fais savoir dès la première journée que nous n’allons pas l’exécuter, que ce ne serait pas long. Je l’informe sur nos motifs, nos demandes au gouverneme­nt, nos exigences. Je lui résume le manifeste du FLQ.

Je lui demande aussi s’il a des médicament­s à prendre, mais il croit à ce moment que tout sera terminé sous peu et ne nous dit rien à ce sujet. Ce n’est que deux ou trois jours plus tard qu’il nous avise des médicament­s qu’il doit prendre.

La recherche de médicament­s avec Nigel est difficile, nous sommes tous très angoissés. Nous avons peur qu’il ait une défaillanc­e durant sa détention. Mais finalement nous obtenons les médicament­s.

À partir de ce moment, quand je lui dis que tout sera terminé sous peu, il me dit que ce sera plus long qu’on le pense. Selon lui, le gouverneme­nt ne prend pas l’enlèvement assez au sérieux.

[…]

Nous sommes toujours sous le choc d’avoir entre les murs de notre maison une personne que nous retenons contre son gré. La réalité est tellement différente de la cause que nous avions idéalisée. Nous sommes fébriles. Je crois que monsieur Cross ressent notre nervosité et cela lui fait peur.

Il a peur que l’un de nous craque et qu’une catastroph­e arrive.

[…]

Dix jours après l’enlèvement du diplomate britanniqu­e, après avoir accepté de faire lire le manifeste du FLQ par un journalist­e à la télévision de Radio-canada, le gouverneme­nt refuse d’accéder à nos demandes de libération des prisonnier­s politiques.

CELLULE DES ROSE

Comme s’il s’agissait d’une suite logique de ce refus, Pierre Laporte est enlevé. Pourtant, rien n’a été programmé avec le groupe de Paul Rose. Le groupe devait être parti en dehors de Montréal et ne rien faire, selon l’entente.

[…]

Quelques jours après l’enlèvement de Pierre Laporte, au cours de l’une de ses sorties, Jacques Cossette-trudel rencontre le groupe de Paul Rose.

[…]

Jacques Cossette-trudel nous fait part à ce moment de l’objectif du groupe de Paul d’exécuter Pierre Laporte comme tout groupe de guérilla le faisait, en nous demandant de faire de même avec James Richard Cross. Jacques Cossette-trudel nous explique qu’il leur a répondu que, pour sa part, c’était non, mais qu’il allait en discuter avec nous.

Nous refusons unanimemen­t. Même si dans les discussion­s de notre groupe nous affirmons comprendre la logique de la demande du groupe de Paul, il n’est pas question que nos actions suivent ce raisonneme­nt.

 ??  ?? Une sorcière parmi les felquistes : journal de la crise d’octobre, Louise Lanctôt, Éditions Le Scriptoriu­m, 324 pages
Une sorcière parmi les felquistes : journal de la crise d’octobre, Louise Lanctôt, Éditions Le Scriptoriu­m, 324 pages

Newspapers in French

Newspapers from Canada