Les jeunes et le racisme
Samedi, je relevais les incohérences, l’absence de nuances et le projet politique qui se dissimule souvent derrière la notion de racisme « systémique ».
Il est intéressant d’observer les réactions des jeunes quand vous percez des trous dans cette notion.
Ils ne vous répondent pas sur le fond. Ils changent de terrain et vont sur celui de la morale.
MAXIMUM
Pour eux, refuser de reconnaître le caractère « systémique » du racisme, c’est refuser de reconnaître la gravité du problème, c’est donc le minimiser.
Vous avez tort de ne pas être suffisamment indigné, de retarder le « progrès », d’entretenir le statu quo.
On est là en plein coeur de ce qu’on appelle maintenant la culture woke
(éveil), qui nous vient des campus américains.
En gros, dès qu’il est question de racisme, la seule position moralement acceptable, c’est le maximalisme.
Il faut, comme disait Richard Martineau, avoir le « piton » de l’indignation collé au fond.
Puisque le racisme est mauvais (évidemment) et qu’il est partout et « systémique » (beaucoup moins évident), la nuance, la modération deviennent suspectes.
Il faut acheter tout au complet et ne chanter qu’avec la chorale.
Dans le New York Times, David Brooks a expliqué tout ce qui ne marche pas avec cette posture morale.
Avant que cette culture woke ne déferle, disait-il, on essayait de cerner un problème objectivement.
Puis on proposait une solution audacieuse ou prudente, de gauche ou de droite, et le débat se faisait sur la qualité de votre solution.
Fini ! Maintenant, on juge d’abord le niveau de votre indignation.
On fait pire encore que mélanger votre perception du problème et votre proposition de solution.
On met plus en évidence la perception, donc l’indignation, que ce que vous proposez comme remède.
La personne vertueuse, qui est vraiment woke, sera celle qui perçoit toute l’étendue de l’injustice.
Dans cet état d’esprit, on n’est jamais assez indigné.
Plus vous êtes woke, plus vous êtes indigné, mieux c’est, meilleur vous êtes.
Dans cette surenchère, forcément, tout y passe : les institutions, les séries télévisées, les manuels scolaires, le langage, les statues, tout.
Est-ce la meilleure façon d’amener de vrais changements ? Non.
Le woke, dit Brooks, se met en scène. Il parade. Il étale sa vertu.
C’est sa principale contribution, comme ces gens qui, après une tuerie dans une école, mettent un signe de paix sur leur page Facebook, allument une bougie et chantent Imagine.
Gros engagement social, champion !
MOTS
Quand on présente un problème comme massif, généralisé, incrusté, universel et largement inconscient, on encourage plus la colère et la frustration que la recherche de solutions concrètes, forcément pragmatiques et ciblées.
Or, dans l’histoire, les réformes durables ont été faites par les gens capables de voir les nuances de gris.
L’indigné, lui, est souvent un daltonien à deux couleurs : noir et blanc.
Son « gros » combat, c’est que Legault crache le mot « systémique ».
Après, il sera fier de lui : sa « job » sera faite. Des mots, des mots, que des mots…
Mais peu lui importe, car c’est une excellente stratégie médiatique pour cultiver sa belle image de pureté morale.
Quand on présente un problème comme massif, généralisé, incrusté, universel et largement inconscient, on encourage plus la colère et la frustration que la recherche de solutions concrètes, forcément pragmatiques et ciblées.