Le Journal de Quebec

La vitesse, ennemi numéro 1

Les élus reçoivent davantage de plaintes cette année pour dénoncer la vitesse des voitures dans leur quartier

- ANNABELLE BLAIS ET PHILIPPE LANGLOIS

Le nombre de citoyens qui se plaignent pour dénoncer les excès de vitesse a explosé en cette année de confinemen­t, selon plusieurs élus municipaux.

Le conseiller municipal de Saguenay Jean-marc Crevier dit avoir remarqué une très forte hausse de plaintes au sujet de la vitesse, au point où il demande d’installer des radars photo. « Cette année, c’est incroyable, trois appels sur quatre que je reçois, c’est pour la vitesse », explique-t-il.

Son hypothèse est qu’en raison du télétravai­l, les gens sont davantage témoins des excès de vitesse dans leurs rues.

Cet été, l’arrondisse­ment montréalai­s Rivière-des-prairies–pointe-auxTremble­s, qui comptait une dizaine de dos-d’âne, en a installé 63 de plus.

« Les gens nous disent qu’ils en veulent plus, on a énormément de demandes », explique la mairesse Caroline Bourgeois.

Au mois d’août, un secteur du boulevard Gouin a aussi été réaménagé pour devenir un sens unique sur un tronçon de 8 km, et la vitesse maximale a été abaissée à 30 km/h.

La deuxième voie a été transformé­e en piste cyclable et des pots de fleurs empêchent les voitures de s’y aventurer. De cette façon, impossible de dépasser ceux qui respectent la limite de vitesse comme c’était le cas avant.

Et la voie étant plus étroite, l’automobili­ste est forcé de ralentir. « En un mois, on voit le changement. Des aînés qui marchent, des enfants en trottinett­e. Les fins de semaine, c’est plein », souligne la mairesse.

Selon les données de la SAAQ que nous avons analysées dans le cadre de notre dossier présenté depuis vendredi sur les routes les plus dangereuse­s du Québec, il y a eu 39 accidents qui ont fait 23 blessés sur le boulevard Gouin entre l’a25 et l’a40, depuis 2014.

Autre bonne raison de réaménager le boulevard : « Chaque année, la CAA faisait un concours de la pire route : on l’avait gagné trois fois », ajoute Mme Bourgeois.

LA SIGNALISAT­ION INSUFFISAN­TE

Selon Lynda Bellalite, professeur au départemen­t de géomatique à l’université de Sherbrooke et spécialist­e de la sécurité routière, l’abaissemen­t de la limite de vitesse ne semble pas diminuer le nombre d’accidents, mais cela a tout de même un impact sur leur gravité. « Le nombre d’accidents reste le même, mais au lieu que ce soit des accidents graves avec des décès, on aura des blessures graves aussi, mais pas de décès », dit-elle.

Chose certaine, pour que les limites soient respectées, il ne faut pas se contenter d’installer une nouvelle signalisat­ion.

« Les panneaux d’affichage ne changent rien. Il faut des dispositif­s modérateur­s, des dos-d’âne, des giratoires », dit-elle.

« Si on fait juste changer le panneau de 50 à 30 km/h sans réaménagem­ent de la rue, les gens continuent à circuler à 50 ».

AUTANT DE PLAINTES QU’AVANT

À Beaconsfie­ld, où la vitesse est limitée à 40 km/h partout sur le territoire depuis 2007, le maire Georges Bourelle dit recevoir toujours autant de plaintes qu’avant.

« Est-ce que le changement à 40 km/h a fait beaucoup de différence ? Je ne pense pas. Il y avait peu d’accidents, on a mis des dos-d’âne pour rendre heureux des citoyens, car ils percevaien­t de la vitesse. »

Les gens consacrent moins de 10 % de leur attention aux panneaux de signalisat­ion, souligne Mme Bellalite. Ce qui influence la vitesse est la configurat­ion de la rue.

« Plus c’est dégagé, plus le conducteur se sent en sécurité, plus il accélère. Plus il se sent contraint, plus il va ralentir », dit-elle.

 ?? PHOTO PIERRE-PAUL POULIN ?? L’arrondisse­ment Rivière-des-prairies–pointe-aux-trembles à Montréal prend les grands moyens pour réduire la vitesse. La mairesse Caroline Bourgeois (sur la photo) a fait installer 63 dos-d’âne cet été seulement. Et les citoyens en demandent davantage pour se sentir en sécurité.
PHOTO PIERRE-PAUL POULIN L’arrondisse­ment Rivière-des-prairies–pointe-aux-trembles à Montréal prend les grands moyens pour réduire la vitesse. La mairesse Caroline Bourgeois (sur la photo) a fait installer 63 dos-d’âne cet été seulement. Et les citoyens en demandent davantage pour se sentir en sécurité.

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