Une dizaine d’heures de détour
Le Journal a constaté la tension dans le parc de La Vérendrye pour la dernière fin de semaine de chasse
MONT-LAURIER |
Des chasseurs qui craignaient la violence et l’intimidation ont fait un détour d’une dizaine d’heures pour éviter de se buter aux barricades de la nation anichinabée en revenant de la dernière fin de semaine de chasse dans le parc de La Vérendrye.
« Ils me suivaient en camion [vendredi]. Ils avaient une grosse sirène avec des haut-parleurs. Ils criaient là-dedans », a raconté Carl Blondin, samedi après-midi, au volant de son Toyota Tundra.
Le chasseur effectuait un immense détour sur le chemin Lépine-clova, qui relie par 200 km le hameau de Clova [La Tuque] à la route 117, dans la Réserve faunique La Vérendrye (voir la carte ci-contre).
Depuis trois semaines, des Autochtones tiennent une barricade à son extrémité empêchant les chasseurs d’entrer ou de sortir par cet accès pour protester contre la chasse sportive (voir texte en page 2).
Vendredi soir, M. Blondin dit aussi avoir été témoin d’intimidation au Relais Évasion, situé sur le même chemin.
« Ils criaient aux gens de quitter. Des retraités. Ils ont eu peur et sont tous partis. La police les a escortés », a-t-il poursuivi.
PEUR DE LA VIOLENCE
Craignant la violence, les chasseurs interrogés par Le Journal samedi faisaient un détour de près de 500 km en passant par Parent, plutôt que de devoir rebrousser chemin une fois à la barricade (voir en page 22).
Plusieurs ont entendu parler de bêtes saisies, d’altercation et de véhicules endommagés au fil des semaines.
« Personne ne brave la 117. Ça nous a fait perdre 50 % de notre saison, qui est bousillée », a raconté une propriétaire de pourvoirie au bord des larmes, qui a demandé à ce qu’on cache son identité par crainte de représailles.
« Ma carabine est prête depuis deux semaines. Je vais peut-être sortir les pieds par en avant, ou les menottes aux poignets, mais ils ne viendront pas m’intimider », a prévenu un autre propriétaire désirant lui aussi rester anonyme.
« Tu appelles la SQ, et tout ce qu’ils disent, c’est : ‘‘mettez-vous pas dans le pétrin’’. Ils sont entre l’arbre et l’écorce », a-t-il dit pour argumenter son choix de se faire justice.
Lors de son passage au Relais Évasion Le Journal a croisé deux agents de la Sûreté du Québec (SQ) qui venaient avertir les responsables qu’un Autochtone filait vers leur campement pour venir les intimider, disant d’aviser les chasseurs s’il y en avait encore de présents.
Du côté de la SQ, malgré les tensions, la situation a été traitée comme une manifestation, bien que toute plainte en lien avec des infractions criminelles fasse l’objet d’une enquête.
ON SE FAIT REVIRER
Après avoir parcouru près de 300 km en une douzaine d’heures, Le Journal s’est aussi cogné le nez au barrage.
« Retournez de bord. Repartez d’où vous êtes venus », a ordonné en anglais une Autochtone dans la vingtaine, samedi soir, peu après la tombée du soleil.
Nos représentants ont retenté leur chance hier matin, sans plus de succès.
« Vous attisez la tension en prenant des photos. On vous demande de partir », nous a-t-on dit.
Le Journal a parcouru le chemin forestier qui sert de détour d’une dizaine d’heures pour les chasseurs du secteur de la réserve faunique La Vérendrye qui désirent éviter les barricades érigées par des membres des Premières Nations. Plusieurs ne cachaient pas leur mécontentement, mais tous préféraient ces kilomètres additionnels à la confrontation.