Le Journal de Quebec

Une Torontoise qui ne parle pas français dirigera la Laurentien­ne

La plupart des administra­teurs et dirigeants de l’institutio­n vivent hors Québec

- SYLVAIN LAROCQUE

Même si la moitié des employés de la Banque Laurentien­ne travaille au Québec, la nouvelle PDG de l’institutio­n ne parle pas français et réside à Toronto.

Rania Llewellyn, 44 ans, prendra les commandes de la troisième plus importante institutio­n financière privée au Québec le 30 octobre après une carrière de 26 ans à la Banque Scotia. Née au Koweït, elle a quitté l’égypte pour immigrer au Canada en 1992.

Ce sera la première fois depuis 1979 au moins que le chef de la direction de la Banque Laurentien­ne ne maîtrisera pas le français.

COURS DE FRANÇAIS EXPRESS

« Depuis près de 175 ans, la Banque Laurentien­ne est enracinée au Québec et elle a l’intention de demeurer ainsi. Mme Llewellyn apprendra le français et passera une grande partie de son temps à Montréal chaque mois », a assuré hier une porte-parole de l’institutio­n, Hélène Soulard.

Mme Llewellyn deviendra par ailleurs la première femme à diriger une grande banque canadienne. Notons toutefois que de 2008 à 2016, Monique Leroux a été à la tête du Mouvement Desjardins, une institutio­n financière beaucoup plus importante que la Banque Laurentien­ne.

« C’est certain qu’on aurait aimé avoir une ou un chef de la direction à Montréal, mais la distance n’est pas un frein au rétablisse­ment d’un dialogue positif. [...] Nous voyons d’un bon oeil l’arrivée d’une femme au poste de PDG, surtout que la majorité de nos membres sont des femmes », a réagi hier la présidente du syndicat des employés de la Banque Laurentien­ne, Julie Tancrède.

« Une embauche externe amène plus de potentiel pour du changement », a quant à lui estimé l’analyste Gabriel Dechaine de la Financière Banque Nationale.

DÉPLACEMEN­T VERS L’ONTARIO

Le comité spécial du conseil d’administra­tion de la banque chargé de trouver un successeur à l’ex-pdg François Desjardins, qui a quitté abruptemen­t son poste en juin, a été présidé par la Torontoise Michelle Savoy. Le président du conseil de l’institutio­n, Michael Mueller, habite également en Ontario.

« Rania Llewellyn est la dirigeante toute désignée pour mener la Banque Laurentien­ne dans une nouvelle ère », a soutenu Mme Savoy dans un communiqué.

En fait, depuis quelques années, la Banque Laurentien­ne est de moins en moins dirigée à partir du Québec. M. Desjardins résidait lui aussi à Toronto. Depuis l’an dernier, plus de la moitié des administra­teurs et des hauts dirigeants de l’institutio­n vivent à l’extérieur du Québec.

Pourtant, plus de 45 % du portefeuil­le de prêts de la Banque Laurentien­ne se trouvait au Québec l’an dernier. La part de la province a toutefois reculé au fil des ans à la faveur d’une stratégie de croissance axée sur le Canada anglais et les ÉtatsUnis. En 2015, la proportion des prêts faits au Québec s’élevait à 58 %.

La Banque Laurentien­ne emploie près de 1500 personnes au Québec sur les 2925 salariés qu’elle compte en tout. Environ 600 d’entre eux sont syndiqués.

La future PDG aura la lourde tâche de redresser la Laurentien­ne, qui connaît des difficulté­s depuis plusieurs années. Au printemps, l’institutio­n a dû sabrer son dividende, ce qu’aucune banque canadienne n’avait fait depuis 1993.

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