Le Journal de Quebec

Une aide fédérale imposée à 80 %

- Daniel Germain

La Prestation canadienne de la relance économique (PCRE) a pris la relève de la PCU depuis trois semaines. On n’est pas contre, seulement on se serait attendu à quelque chose de plus raffiné, vu tout le temps dont a disposé Ottawa pour élaborer ce programme.

Le problème ? Il fera grimper le taux effectif marginal d’imposition (TEMI) autour de 80 % sur certaines tranches de revenus des bénéficiai­res.

Ce n’est pas ce qu’on appelle un incitatif au travail…

LA PCRE IMPOSABLE…

La PCRE s’adresse aux personnes qui ne sont pas admissible­s à l’assurance-emploi améliorée, elle vise particuliè­rement les travailleu­rs autonomes dont les revenus se sont effondrés à cause de la pandémie.

Pour y avoir droit, il faut démontrer une baisse substantie­lle de ses entrées d’argent, de l’ordre de 50 %.

Comme avec la PCU, les sommes versées en vertu de ce nouveau programme sont imposables. Les bénéficiai­res ont droit à 1000 $ par période de deux semaines, une somme sur laquelle est prélevé un impôt à la source de 10 %. S’il faut en payer plus, ce ne sera qu’au printemps, après avoir rempli sa déclaratio­n de revenus.

La prestation doit être demandée toutes les deux semaines, pour un maximum de 13 périodes, donc 26 semaines au total.

… ET RÉCUPÉRABL­E À 50 %

L’un des gros défauts de la PCU

(500 $/semaine), c’est qu’elle était coupée en totalité dès qu’on déclarait des revenus de 1000 $ par période de quatre semaines. C’est ce qui découragea­it bien du monde de retourner travailler. À 950 $ de revenu, on pouvait toujours passer Go ! et réclamer sa pleine PCU.

La PCRE corrige ce problème en partie par un mécanisme de récupérati­on progressif. Pour chaque dollar gagné au-delà de 38 000 $, le gouverneme­nt coupe 50 cents du montant de la prestation, remboursab­le en même temps que l’impôt, au printemps.

« C’est mieux que la PCU, mais le taux de récupérati­on de la PCRE reste très élevé. Si on ajoute l’impôt, ça n’encourage pas vraiment les travailleu­rs autonomes à chercher des contrats qui porteraien­t leurs revenus au-delà du seuil de récupérati­on de la nouvelle prestation », croit le fiscaliste et planificat­eur financier Dany Provost, associé au groupe SFL.

L’expert a réalisé des calculs pour le cas d’un travailleu­r autonome, avec un conjoint et deux enfants. Le bénéficiai­re de la PCRE serait frappé par l’équivalent d’un taux d’imposition (TEMI) frisant les 80 % pour chaque dollar gagné au-delà de 38 000 $.

Selon d’autres calculs effectués pour Le Journal par la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques de l’université de Sherbrooke, le TEMI maximal atteint 85,8 % dans le cas d’un ménage monoparent­al avec un enfant. Pour un dollar gagné, il reste donc 14,2 cents dans les poches de ce travailleu­r autonome bénéficiai­re de la nouvelle prestation d’ottawa.

Il aurait probableme­nt été plus efficace d’abaisser le seuil et le taux de récupérati­on. Par exemple, on aurait pu imaginer un système où un bénéficiai­re commence à rembourser sa PCRE à partir de 30 000 $, mais à la vitesse de 25 % au lien de 50 %.

La pente fiscale aurait été plus douce.

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