100 M$ pour la santé mentale
Québec débloque des fonds pour aider les personnes affectées par la pandémie
L’investissement de 100 M$ en santé mentale annoncé dans la foulée de la tuerie de Québec a été bien accueilli hier, mais les sommes devront devenir récurrentes, disent les intervenants.
En réaction aux événements du weekend, le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux Lionel Carmant a devancé cette annonce prévue lors de la mise à jour budgétaire, le 12 novembre prochain.
Le montant, décliné en plusieurs volets, permettra de rehausser les services d’aide psychologique jusqu’en mars 2022, autant pour les citoyens anxieux en raison de la pandémie que pour les personnes souffrant de troubles mentaux sévères ( voir encadré).
Au sortir du confinement au printemps dernier, 12 % des Québécois disaient vivre une détresse psychologique problématique (contre seulement 2 % en temps normal) et plus du tiers se sentaient davantage anxieux, selon les données de l’institut national de santé publique du Québec (INSPQ). « Les effets néfastes sur la santé psychologique peuvent être effectivement nombreux, et les besoins psychosociaux continueront de se manifester au-delà de la gestion de la crise sanitaire que nous vivons actuellement et du déconfinement », a déclaré le ministre Carmant.
LISTE D’ATTENTE
Quelque 16 000 personnes attendent des services en santé mentale dans le réseau public, contre 28 000 en 2018. Cette donnée fait dire au ministre Carmant que la « situation est préoccupante », mais « sous contrôle ».
Mais l’alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), elle, n’hésite pas à parler d’une « crise » de santé mentale. Elle salue l’investissement important, mais souhaite le voir devenir récurrent. « Il faut multiplier et accélérer les pas, sinon nous ne surmonterons jamais cette crise », affirme sa présidente, Andrée Poirier.
RESSOURCES INSUFFISANTES
Même son de cloche du côté de l’association des médecins psychiatres du Québec (AMPQ). « Ces montants n’ont du sens que dans la mesure où ça s’inscrit dans quelque chose qui va être récurrent », dit le Dr Olivier Farmer, psychiatre à l’hôpital Notre-dame, à Montréal, et porte-parole pour l’association.
Mais les besoins pour les patients atteints de maladies mentales, les cas lourds que traitent les psychiatres, vont bien au-delà des sommes annoncées hier. « Ici, au centreville de Montréal, on est capables d’offrir l’hospitalisation à environ un patient sur dix », déplore le Dr Farmer.
Un phénomène de « portes tournantes » que connaissent bien les policiers des grandes villes qui se sont transformés, bien malgré eux, en travailleurs sociaux depuis le mouvement de désinstitutionnalisation.
Martine Fortier, présidente de la Fraternité des policiers et policières de la Ville de Québec (FPPVQ), donne l’exemple récent d’un homme suicidaire qui a reçu son congé de l’hôpital quelques jours après avoir été admis. « On a eu trois appels pour le même homme en l’espace de deux semaines, illustre-t-elle. […] Ça demande des ressources. Mais on ne peut pas ne pas le chercher, il y a des vies en danger. »