Le Journal de Quebec

Trump a gagné

- RICHARD MARTINEAU richard.martineau @quebecorme­dia.com

Au moment d’écrire cette chronique (hier après-midi), je ne connaissai­s pas encore les résultats de l’élection.

Mais ça ne fait rien.

Je n’avais pas besoin de les connaître.

Car quoi qu’il arrive, quel que soit le résultat final, Trump a gagné.

DE GAULLE ET TRUMP

En effet, tout comme le gaullisme a survécu à De Gaulle, le trumpisme survivra à Trump.

Je ne dis pas que les deux hommes se valent, bien sûr. Jamais je n’oserais faire une telle comparaiso­n entre l’homme du 18 juin et l’ex-animateur de The Apprentice !

Mais tous deux ont donné un sacré coup de pied dans le système électoral et politique de leur pays.

Que l’on soit d’accord ou pas avec ses prises de position, qu’on déteste le personnage ou non, le magnat de l’immobilier a gagné son pari.

Il a prouvé au monde entier que les populistes de droite pouvaient prendre le pouvoir aux États-unis.

Le milliardai­re Ross Perot a essayé en 1992, mais n’a recueilli que 19 % des voix.

L’égérie du Tea Party Sarah Palin a essayé en 2008, aux côtés de John Mccain, mais le duo a mordu la poussière contre Barack Obama.

Avec Trump, la troisième tentative fut la bonne.

Les populistes de droite qui détestent les représenta­nts de l’élite, les journalist­es et toutes les figures associées de près ou de loin à l’establishm­ent politique, médiatique et académique ont pu enfin goûter au pouvoir pendant quatre ans.

Et vous pensez que l’aventure se terminera comme ça ?

Vous rêvez.

Même si le Parti républicai­n décide de faire amende honorable, de redevenir un « grand parti parapluie » et d’effacer toutes traces de son ancien chef, le trumpisme est là pour rester.

Pour le meilleur et surtout pour le pire.

HEUREUX LES CREUX

Qu’est-ce qui caractéris­e le trumpisme ?

À mon avis, six choses. La méfiance envers les élites, quelles qu’elles soient.

Voir d’un très mauvais oeil tout ce qui menace ou affaiblit la souveraine­té nationale (les gros machins bureaucrat­iques comme L’ONU, L’OMS, etc., mais aussi les alliances économique­s et militaires).

Le populisme (flatter le peuple dans le sens du poil, ou comme diraient certains : parler au peuple de choses qui intéressen­t le peuple avec les mots du peuple).

Parler directemen­t aux gens sans passer par les médias.

Prendre plaisir à refuser toute forme de rectitude politique, quitte à être grossier, vulgaire, sexiste et raciste.

Et, dernier point, mais non le moindre : décomplexe­r

Joe Six Pack qui a toujours eu un peu honte de son manque d’éducation et de culture.

« Il est souvent arrivé que tu te sentes rabaissé parce que tu n’avais pas de diplôme universita­ire ? Pas de problème, mon ami, de toute façon, l’enseigneme­nt supérieur abrutit les gens et sape leur jugement ! »

C’est une forme de rousseauis­me anti-intellectu­el : l’homme est bon par nature, mais l’éducation le corrompt.

L’ignorance n’est pas une faiblesse : c’est une force !

PARASITE

Comme le parasite du filmculte Alien, le trumpisme a pondu ses oeufs dans le ventre du Parti républicai­n.

Après cinq ans, le temps est venu pour ce mouvement de jaillir de son hôte et de vivre sa vie.

Et comme dans la suite, Aliens, la créature fera des petits. Et proliférer­a.

C’était un homme. C’est maintenant une armée.

Le trumpisme survivra à Trump.

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