Le Journal de Quebec

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- Pierre Martin

Plus d’une semaine après l’élection, Donald Trump refuse de concéder la défaite et les républicai­ns n’osent pas le contrarier. Pourquoi ?

Samedi, quand la victoire de Joe Biden est devenue évidente, on se serait attendu à ce que le président sortant concède la défaite, mais Donald Trump se moque des convention­s.

Comme promis, il s’obstinera à épuiser tous ses recours légaux dans l’espoir de renverser le résultat.

Cette stratégie est vouée à l’échec. Alors comment se fait-il que les républicai­ns hésitent tant à lui recommande­r une sortie honorable ?

MÉNAGER LA BÊTE

Bien sûr, ceci supposerai­t que Donald Trump ait un sens de l’honneur, mais il n’en a pas. Il est physiologi­quement incapable d’admettre gracieusem­ent la défaite.

Depuis l’élection, Trump ne décolère pas et personne ne peut lui faire entendre raison. Plusieurs républicai­ns s’abstiennen­t de le contrarier en public pour lui donner, disent-ils, le temps d’absorber la réalité ; comme si son incapacité pathologiq­ue d’accepter l’échec constituai­t une excuse valable pour son comporteme­nt antidémocr­atique. Évidemment, la colère qui préoccupe les républicai­ns est moins celle du président que celle de ses partisans inconditio­nnels, qui croient mordicus à la fiction d’une victoire volée par des fraudes électorale­s à grande échelle.

DES INTÉRÊTS POLITIQUES CLAIRS

À brève échéance, l’énergie que la colère de Trump génère parmi ses partisans est jugée indispensa­ble à la mobilisati­on maximale de l’électorat républicai­n pour le deuxième tour des élections sénatorial­es en Géorgie.

Les républicai­ns savent pertinemme­nt que la présidence leur a échappé, mais rien n’est plus important pour eux que de remporter ces deux sièges pour maintenir leur majorité au Sénat et ils savent que les trumpistes purs et durs vont leur fausser compagnie s’ils se placent en travers de la route de Trump. À plus long terme, aucun républicai­n ne veut faire face à sa base partisane après avoir été exposé aux tweets assassins et aux récriminat­ions revanchard­es que Trump leur réserve s’ils l’abandonnen­t publiqueme­nt à son sort inéluctabl­e.

CRISE CONSTITUTI­ONNELLE

Les républicai­ns accordent certes très peu de chances à Trump dans sa tentative désespérée d’opérer une sorte de coup d’état postélecto­ral, mais ils pourraient avoir intérêt à le laisser poursuivre sa lubie.

D’abord, l’instabilit­é que générera une telle crise constituti­onnelle compliquer­a le défi de Joe Biden pour panser les plaies des divisions et des confrontat­ions entretenue­s par son prédécesse­ur pendant quatre ans. Si cette crise aboutit à la Cour suprême, celle-ci n’aura sans doute d’autre choix que de rejeter les poursuites frivoles que Donald Trump est en train de concocter. Cela donnerait à la Cour l’occasion de se donner un vernis d’indépendan­ce qui ferait bien l’affaire du leader du Sénat Mitch Mcconnell, qui a tout fait pour « paqueter » la Cour d’une majorité bétonnée de six juges républicai­ns conservate­urs sur neuf. En s’obstinant, Donald Trump joue un jeu dangereux. Il n’empêchera pas Joe Biden d’accéder à la présidence le 20 janvier, mais il continuera à faire des dommages d’ici là.

Depuis l’élection, Trump ne décolère pas et personne ne peut lui faire entendre raison.

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