Un coup de barre pour réduire les GES d’ici 2030
Le plan de 6,7 G$ du gouvernement du Québec est loin de l’objectif selon les groupes environnementaux
Le gouvernement Legault dit lancer un plan « ambitieux » pour réduire les gaz à effet de serre de la province d’ici 10 ans, mais il a les allures d’un devoir à moitié fait, selon des groupes environnementaux.
« On va dans la mauvaise direction. Au lieu de réduire les GES, on est en train de les augmenter », a reconnu d’emblée le premier ministre François Legault, estimant que le Québec avait besoin d’un « coup de barre » pour contribuer à la lutte au réchauffement climatique.
C’est pourquoi il a annoncé, hier, des investissements de 6,7 milliards pour les cinq prochaines années afin de réduire de 37,5 % d’ici 2030 les émissions de GES au Québec par rapport à 1990.
Pour y arriver, le Plan pour une économie verte (PEV) mise notamment sur l’électrification des transports, un secteur responsable, à lui seul, de plus de 43 % des émissions de GES du Québec.
Le gouvernement veut ainsi compter sur 1,5 million de véhicules électriques en circulation d’ici 10 ans et veut que plus de la moitié des autobus urbains et scolaires soient électrifiés.
Aussi, aucun véhicule neuf à essence ne pourra être vendu après 2035 et Québec s’engage à ajouter plus de 2500 bornes de recharge électrique sur le territoire.
De plus, le plan présenté hier vise à réduire de moitié les émissions liées au chauffage des bâtiments résidentiels, commerciaux et institutionnels, en les convertissant à l’électricité.
François Legault a dit que la province a l’« obligation morale » de s’attaquer à la pollution, sans quoi le premier ministre souligne qu’il ne « pourrait pas regarder [ses] deux fils dans les yeux ».
« Toutes les mesures sont là, ça n’a jamais été fait avant », a-t-il ajouté.
MOINS QUE LA MOITIÉ
Or, même s’il qualifie le PEV d’ambitieux, il reconnaît que celui-ci ne chiffre que 42 % de l’objectif.
C’est-à-dire que si tout se réalise comme prévu, le Québec n’aura pas encore atteint la moitié de son but.
« C’est inquiétant d’avoir un plan qui, d’emblée, ne permet pas d’atteindre la cible. C’est comme partir en expédition pour escalader une montagne, mais avec un plan juste pour se rendre à la moitié », déplore Patrick Bonin de Greenpeace.
À l’assemblée nationale, les partis d’opposition ont tous reproché cet aspect du plan au gouvernement, y voyant un aveu d’échec avant même de commencer.
Hier, François Legault a dit compter sur la contribution du fédéral et l’arrivée de nouvelles technologies pour combler le manque à gagner.
PAS DE TAXES
Par ailleurs, le gouvernement n’entend pas taxer davantage les consommateurs et les entreprises pour les inciter à moins polluer ou à faire des choix plus verts.
« Pas question, au Québec, d’augmenter quelque taxe ou impôt que ce soit », a-t-il assuré, rappelant ses engagements électoraux.
C’est pourtant ce que réclament divers groupes environnementaux, qui estiment que le PEV de la Coalition avenir Québec n’est pas assez contraignant.
« En refusant de faire ça, le gouvernement risque de ne pas atteindre ses objectifs », plaide Marc-andré Viau, directeur des relations gouvernementales d’équiterre, qui estime qu’il s’agit d’un puissant levier pour changer les habitudes des consommateurs.
PRESSION SOCIALE
Mais le ministre de l’environnement Benoit Charette dit que son gouvernement fait le pari du pragmatisme, préférant éviter « les mesures punitives ».
Le PEV sera soumis à un comité d’experts indépendants et au commissaire au développement durable pour en assurer le suivi. Il sera mis à jour chaque année.
N’empêche, Patrick Bonin de Greenpeace souligne que rien ne garantit que les mesures présentées seront respectées. Aucune loi ne contraint le gouvernement à les suivre.
« La plus grande contrainte, c’est la pression sociale », a quant à lui affirmé M. Legault, rappelant que près d’un demi-million de personnes ont manifesté dans les rues de Montréal l’an dernier pour décrier l’inaction des gouvernements face à l’urgence climatique.