Tout miser sur Noël
Il se peut que Noël nous coûte cher cette année, collectivement.
Après huit mois de pandémie, dont les deux derniers à souffrir des nombreuses mesures de reconfinement, les Québécois risquent de lâcher leur fou pendant les quatre jours de trêve permettant quelques réveillons à la chaîne.
François Legault a beau solliciter la raisonnabilité du peuple, embellir la notion de risque en la coiffant du terme « contrat moral », n’empêche que la porte est ouverte à des abus.
Du 24 au 27 décembre, les assoiffés de liberté que nous sommes devenus pourront organiser un nombre de rassemblements illimité, pourvu qu’ils soient composés de 10 personnes au maximum chaque fois.
Une fois entre ami(e)s, entre frères et soeurs et beaux-frères retrouvés, et surtout, la dive bouteille bien entamée, il sera dur de maintenir les cerveaux programmés en mode COVID.
Dans les pourparlers entre la Santé publique et le gouvernement, il a été question de limiter le nombre de rassemblements autorisés à deux seulement, pendant cette période de quatre jours.
Mais dans leurs dernières délibérations, ils ont préféré laisser tomber. On voyait mal comment les forces de l’ordre auraient pu intervenir en cas de plainte. « Bonjour messieurs-dames, désolés d’interrompre votre soupé arrosé, il y a plusieurs voitures dans la cour et on se demandait, vous n’aviez pas déjà fait vos deux rassemblements permis, là, vous ? »
Bon, on comprend. Mais il y aura de multiples rassemblements intérieurs. Et bien des gens, même s’ils le voulaient, ne pourront appliquer la demande d’isolement préventif une semaine avant et après.
On n’a qu’à penser aux travailleurs de la santé, aux policiers, aux employés des magasins, de transport en commun ou autres.
FERMETURES PRÉVENTIVES
Non seulement le nombre de malades risque d’augmenter fortement, avec les conséquences que cela entraînera dans les hôpitaux, mais en plus, les restaurants, bars, gyms, cinémas et salles de spectacles resteront fermés encore plus longtemps.
Déjà que c’est pour permettre les rassemblements de Noël qu’on leur impose une mise sur pause qui ne finit plus, en amont.
Il y aura un coût à assumer. Les annonces de fermeture se multiplient.
MIEUX POUR LES ÉCOLES
Au moins, les enfants ne feront pas les frais du derby de party à échelle réduite.
On ne sait trop quelle mouche a piqué le premier ministre pour qu’il affirme sérieusement, mardi, qu’il envisageait de prolonger les vacances des Fêtes de deux semaines, sans enseignement à distance pour les élèves. Et d’ouvrir les services de garde des écoles. Ça n’avait pas de bon sens.
La seule explication logique, c’est qu’il a volontairement lancé un affreux ballon pour que la solution retenue et annoncée jeudi ressemble encore plus à un joli cerf-volant rassembleur aux teintes d’arc-en-ciel.
Les jeunes ne perdront pas de temps d’enseignement, donc, puisque seuls les élèves du secondaire resteront à la maison une semaine de plus, à compter du 4 janvier, mais ils auront des cours en ligne.
Le sacrifice qu’on leur impose, c’est de ne pas leur permettre de reprendre la pratique de leur sport, ou de leur activité culturelle. Là aussi, il va finir par y avoir un prix à payer. Enfin...
Oui, les Québécois en ont assez de la noirceur, et retrouver leurs proches, en chair et en os, leur fera du bien. Cette période de petits Noëls successifs mettra un sourire sur bien des visages qui en ont besoin.
Mais les risques sont réels.
Il faudra que tous se montrent à la hauteur pour éviter que cette source de lumière ne se transforme en regrets.