Le Journal de Quebec

Le nerf de sa main détruit à jamais

Il a dû réapprendr­e à vivre avec un corps qu’il ne reconnaiss­ait plus en raison de la COVID-19

- JÉRÉMY BERNIER

Un père de famille foudroyé par le virus ne retrouvera plus jamais l’usage complet de la main gauche en raison de la façon dont il était positionné durant les 15 jours qu’il a dû passer dans le coma.

Quand il est sorti du coma à la mi-avril, Georges Aguiar avait perdu 40 % de sa masse musculaire, éprouvait des difficulté­s respiratoi­res et faisait de l’arythmie.

Auxiliaire en santé à Deux-montagnes, l’homme de 47 ans a donc dû réapprendr­e à marcher puisque ses jambes n’étaient plus capables de le porter. Sans parler de la fatigue constante qui le rattrapait à chaque effort.

« J’ai été levé au lève-personne pendant une semaine. Je ne pouvais pas croire que j’étais rendu à ce niveau-là. Je ne reconnaiss­ais pas mon corps », dit-il.

Et il a dû utiliser une marchette pendant quelques jours après sa sortie de l’hôpital.

Six mois plus tard, outre une arythmie cardiaque persistant­e, des tests neurologiq­ues ont confirmé l’atteinte de son nerf cubital, situé le long de son avant-bras, ce qui affectera l’usage de sa main gauche.

Cette séquelle permanente aurait été causée par un mauvais positionne­ment de sa main lorsqu’on l’a placée sur le ventre quand il était dans le coma, jumelé à son poids assez élevé.

Pourtant, M. Aguiar estime que cette situation aurait pu être évitée si on l’avait pris au sérieux dès qu’il a commencé à ressentir des symptômes s’apparentan­t à ceux que l’on associe aujourd’hui à la COVID-19.

« J’avais les yeux rouges, puis j’ai commencé à avoir des maux de gorge, de la diarrhée et de la fièvre intense », se rappelle le quadragéna­ire.

À trois reprises en autant de jours, il a contacté en vain la Ligne COVID, dit-il.

UN COUP DE POING

« La quatrième journée, j’étais trop faible même pour parler, alors j’ai appelé l’ambulance. Ils m’ont assuré que j’avais la COVID et m’ont demandé pourquoi je n’avais pas été me faire tester plus tôt. Il a fallu attendre que je ne tienne plus debout pour qu’on me prenne au sérieux », déplore M. Aguiar.

Après deux jours passés aux soins intensifs, le médecin est venu le voir pour lui dire d’appeler sa famille parce qu’on allait l’intuber et qu’il allait être plongé dans le coma.

« Il m’a dit : “Vous avez 30 minutes pour dire au revoir à votre famille parce que je ne suis pas sûr que vous allez vous réveiller”. J’ai pris ça comme un coup de poing dans la face », se remémore celui qui est père d’un garçon de 7 ans et d’une fille de 10 ans.

« VOUS AVEZ 30 MINUTES POUR DIRE AU REVOIR À VOTRE FAMILLE ; JE NE SUIS PAS SÛR QUE VOUS ALLEZ VOUS RÉVEILLER »

– Le médecin avant de l’intuber

DES HALLUCINAT­IONS

Il s’est réveillé deux semaines après avoir été plongé dans un coma artificiel qui lui a sauvé la vie.

En pleine hallucinat­ion, il a même retiré ses propres tubes qui lui permettaie­nt de respirer quelques heures plus tôt, sous le regard ébahi des infirmière­s. Ce n’est qu’une semaine plus tard, lorsqu’il est devenu complèteme­nt lucide, que son médecin lui a raconté son exploit.

Et après une hospitalis­ation qui aura finalement duré un mois, on lui a permis de quitter l’hôpital la veille de l’anniversai­re de son fils, le 1er mai 2020.

 ?? PHOTOS CHANTAL POIRIER ET COURTOISIE ?? Georges Aguiar, au début du mois de novembre, alors qu’il allait mieux. En mortaise, aux soins intensifs en avril, une semaine après s’être réveillé d’un coma de 15 jours.
PHOTOS CHANTAL POIRIER ET COURTOISIE Georges Aguiar, au début du mois de novembre, alors qu’il allait mieux. En mortaise, aux soins intensifs en avril, une semaine après s’être réveillé d’un coma de 15 jours.

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