Ils achètent votre maison comptant
La Ville de Longueuil a déclaré la guerre à des entrepreneurs en construction
Des entrepreneurs en construction prêts à acheter des bungalows à gros prix en argent comptant pour bâtir leurs plex se font brasser par la mairesse de Longueuil, qui veut mettre fin au Far West.
« Plus de 90 % des bungalows que l’on démolit, vous n’iriez même pas rester dedans. Ce sont des blocs de béton. L’humidité rentre partout. Les personnes qui vendent ces maisons-là n’ont pas d’argent, donc ils ne peuvent pas les réparer et les entretenir », a expliqué Steeve Blanchet, propriétaire de Construction Propulsion.
La semaine dernière, la mairesse de Longueuil, Sylvie Parent, a créé un choc dans le monde de la construction en dénonçant la démolition de bungalows de certains quartiers au profit d’immeubles à revenus.
« Le Far West vit ses derniers moments à Longueuil ! », a-t-elle affirmé, en promettant de nouvelles règles pour « sonner la fin à la récréation ».
Sa sortie faisait écho au groupe Facebook « Résident.e.s de Longueuil pour un urbanisme cohérent », qui canalise la colère des résidents qui n’en peuvent plus de voir des bungalows des alentours rayés de la carte.
« J’ai peur des délais, et que, pendant ce temps-là, le massacre continue. Il faut un moratoire pour que l’on arrête tout de suite de délivrer des permis », a déploré Lyette Bouchard, résidente de Longueuil et cofondatrice du groupe.
« Depuis un an, on cogne à ma porte pour acheter notre maison. Ils sont très insistants. On brosse un portrait négatif de l’économie. On offre la lune », a observé Jacynthe Plamondon-émond, de Longueuil.
« ARGENT COMPTANT »
Au cours des derniers jours, Le Journal a parlé à plusieurs entrepreneurs pour entendre ce qu’ils avaient à dire en pleine tempête.
Pour Jeffly Julien, de JLN Solutions, embauché par les constructeurs pour trouver des maisons ou des terrains sur lesquels bâtir des immeubles à logement, le jeu en vaut la chandelle.
« On achète souvent en argent comptant. On n’a pas à aller chercher de l’aide des banques. Ça permet de rendre le processus plus facile parce que c’est liquide », a expliqué l’homme d’affaires de 25 ans, payé à la commission.
DRAMES HUMAINS EN VUE
Divorces, difficultés financières, maisons délabrées… Jeffly Julien est parfois prêt à payer jusqu’à 20 % de plus pour mettre la main sur des propriétés.
« J’ai une trentaine de maisons. Si Longueuil va de l’avant, je vais perdre un bon 100 000 $ par maison, plus les profits, donc je risque de perdre un bon cinq ou six millions de dollars », a souligné Steeve Blanchet, de Construction Propulsion.
D’après lui, non seulement l a Ville va trop vite, mais des drames humains risquent d’éclater bientôt parce que des gens qui avaient cru vendre leur bungalow 300 000 $ vont voir leur prix chuter de plus de 100 000 $.
« Les entrepreneurs qui les avaient achetés ne les voudront plus s’ils n’ont plus le droit de faire un plex. Tout le monde va être perdant là-dedans. Les promoteurs vont perdre de l’argent et les gens qui avaient vendu leur maison vont se retrouver le bec à l’eau », a-t-il conclu.
En octobre dernier, le prix médian d’un plex (2 à 5 logements) était de
629 000 dollars, comparativement à 561 000 dollars l’an dernier dans le secteur de Longueuil, selon l’association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec (APCIQ).