Le Journal de Quebec

Nul ne peut ignorer la loi, avertissen­t des experts

- ALEXANDRE ROBILLARD

Deux experts en droit et en déontologi­e trouvent anormal et imprudent que le juge en chef Jacques R. Fournier ait ignoré l’existence d’une politique sur les voyages des magistrats.

Maxime St-hilaire, professeur à la faculté de droit de l’université de Sherbrooke, est étonné.

« Le droit oppose aux justiciabl­es le principe que nul n’est censé ignorer la loi », dit-il.

Selon M. St-hilaire, M. Fournier est pourtant personnell­ement chargé par la politique du Conseil canadien de la magistratu­re (CCM) d’autoriser ou non les voyages des juges de la Cour supérieure qu’il supervise.

« On s’attend à ce que les juges connaissen­t les règles qui s’appliquent à eux et qu’ils sont chargés d’appliquer à la magistratu­re », a-t-il dit.

M. St-hilaire souligne que la politique du CCM vise entre autres à éviter que des juges ternissent la réputation de la magistratu­re en s’associant à des activités contraires aux droits de la personne.

Il juge problémati­que que cet aspect ne semble pas avoir été considéré.

« Si ça ne lui est jamais passé par la tête, il a agi contrairem­ent à la politique, et d’autant plus qu’il est chargé de l’applicatio­n de politique », a-t-il dit.

PRUDENCE

Sèdjro Hountohote­gbè, aussi professeur de droit à l’université de Sherbrooke, croit que la population pouvait s’attendre à plus de M. Fournier.

« Le fameux adage “Nul n’est censé ignorer la loi” existe, et encore plus quand on est magistrat », a-t-il dit.

M. Hountohote­gbè estime qu’il aurait été plus prudent pour M. Fournier d’informer le commissari­at fédéral à la magistratu­re de son voyage, comme le prévoit la politique du CCM.

« Un degré supplément­aire de prudence, en raison du contexte de tensions en Chine, aurait été de consulter le commissair­e », a-t-il dit.

Selon M. Hountohote­gbè, toute participat­ion d’un juge en chef à une activité internatio­nale a une connotatio­n politique et aurait pu créer la perception que la magistratu­re canadienne « s’accommode de certains traitement­s qui, officielle­ment au Canada, sont déplorés pour nos ressortiss­ants à l’étranger ».

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