La plus riche famille du pays poursuivie pour 700 millions
Des actionnaires d’une pharma d’ici disent avoir été floués par Peter Thomson
Des centaines d’investisseurs qui ont vu leurs économies fondre dans une entreprise pharmaceutique de Laval font preuve d’une audace hors du commun en réclamant près de 700 millions $ en dommages à l’un des membres de la plus riche famille du Canada.
Le 1er avril 2019, Prometic, une entreprise cotée à la Bourse de Toronto, a annoncé manquer d’argent et devoir procéder à une « intervention urgente » pour restructurer sa dette et se renflouer.
« Quand on a reçu la nouvelle, le coeur nous a tombé à terre », raconte Alain Bilodeau, un actionnaire de Prometic.
Il fait partie des 650 investisseurs qui ont récemment déposé en Cour supérieure une poursuite contre Thomvest, la firme d’investissement du milliardaire Peter Thomson, dont la famille contrôle le géant Thomson Reuters.
UNE ACTION POUR 1000
Par le truchement d’une filiale aux îles Caïmans, Thomvest a pris le contrôle de Prometic en juin 2019. Important créancier de Prometic, Thomvest a converti ses prêts en actions et a réinjecté des fonds dans l’entreprise, diluant fortement les actionnaires existants.
Au terme de la restructuration de Prometic, les actionnaires se sont retrouvés avec une seule action pour chaque bloc de 1000 actions qu’ils détenaient.
Du jour au lendemain, plus de 100 millions $ sont ainsi partis en fumée.
« Quand tu investis dans des actions, il n’y a rien de garanti, tu peux perdre. Mais se faire magouiller comme on s’est fait magouiller, ça, c’est une autre histoire », peste un autre actionnaire de Prometic, Marc Samson.
Dans la poursuite, les investisseurs, qui proviennent du Québec et de trois autres provinces, allèguent que Thomvest a fait preuve d’un « comportement illégal, frauduleux et hautement préjudiciable ».
Les petits actionnaires n’ont jamais digéré que Prometic raye complètement la valeur de l’un de ses produits vedettes, l’immunoglobuline intraveineuse, jusque-là établie à 150 millions $. Selon eux, cette radiation comptable a donné le prétexte que recherchait Thomvest pour s’emparer de l’entreprise.
Ils souhaitent non seulement récupérer la valeur qu’avaient leurs investissements avant la restructuration de Prometic (29,5 cents par action), mais également le rendement auquel ils s’attendaient en fonction d’une évaluation enthousiaste faite en 2018 par Morgan Stanley (8,30 $ par action).
« AUCUN MÉRITE »
« Nous croyons que la poursuite n’a aucun mérite et nous comptons nous défendre vigoureusement », a réagi au Journal le président de Thomson Asset Management, Eugene Siklos.
Pour l’instant, Thomvest n’a pas eu beaucoup de succès avec Prometic, rebaptisée Liminal Biosciences. Le cours boursier de l’entreprise a plongé de plus de 75 % depuis juin 2019. Une décision cruciale des autorités américaines pour l’avenir de l’entreprise est attendue en juin.