Rémi Nadeau
Le 6 avril, en rétropédalant sur des assouplissements qui avaient été brièvement accordés en zone rouge, François Legault a prévenu qu’avril serait le « mois de tous les dangers ». En rétrospective, l’avertissement aurait pu servir à son propre gouvernement qui a connu ses pires moments tout en balayant cavalièrement les critiques.
La confusion entourant l’obligation du port du masque à l’extérieur a été malsaine du début à la fin et a nui à l’adhésion aux consignes sanitaires.
D’abord, la décision a été annoncée dans un communiqué en soirée, après la conférence de presse du premier ministre et du Dr Horacio Arruda, qui n’en avaient pas soufflé un mot. Ensuite, comme la mesure n’avait pas été expliquée, tant les policiers que les citoyens ne comprenaient pas ce qui était permis. Et c’est fondamental parce que les activités sportives extérieures restent presque l’unique moyen d’évasion contre la déprime covidienne.
Appelé ensuite à en citer la base scientifique, le directeur de la Santé publique n’a pas été convaincant. Il a même reconnu l’incohérence de la demande faite aux couples qui n’habitent pas ensemble, mais qui se voient à la maison, de porter le masque en marchant dehors.
Puis, pour ajouter l’insulte à la blessure, François Legault, en constatant le gâchis, a annoncé sa volte-face sur… Facebook.
PARLER AUX QUÉBÉCOIS
Est-ce utile de rappeler que le premier ministre ne s’est pas adressé ainsi à l’ensemble des Québécois, mais seulement aux abonnés de son compte ?
En ne répondant pas aux questions, son « annonce » laissait encore place à l’interprétation.
Puis, mardi dernier, le premier ministre a erré en laissant entendre que le nombre de « jeunes » de moins de 60 ans hospitalisés avait doublé comparativement au sommet atteint lors de la première vague. Le ministre de la Santé, lui, a été contredit par l’association des pharmaciens propriétaires quant à la vaccination des malades chroniques.
Le gouvernement en a plein les bras avec cette pandémie qui n’en finit plus. François Legault, Christian Dubé, Horacio Arruda abattent un boulot colossal sans compter les heures. Ils ont l’approbation d’une bonne majorité de Québécois. Et il vaut mieux vivre au Québec qu’en Ontario ces temps-ci.
Mais M. Legault doit se rappeler le message d’humilité qu’il avait lancé à son jeune gouvernement en prenant le pouvoir en 2018.
Cette façon de faire une annonce de santé publique sur Facebook, de limiter à peau de chagrin les échanges entre ses députés et les membres de la presse, et de ridiculiser des demandes légitimes de l’opposition, donne l’impression d’un gouvernement qui se croit libre de faire tout ce qu’il veut.
DÉCONNECTÉ ?
Il fallait voir la vice-première ministre, Geneviève Guilbault, se moquer des libéraux qui ont réclamé un minimum de débat sur la reconduction de l’urgence sanitaire, mercredi. « Il faut vraiment être déconnecté pour amener cette idée-là ce matin », a asséné la vice-première ministre, sourire aux lèvres.
Or, la question n’est pas de savoir si l’état d’urgence est encore justifié (la réponse est oui), mais de savoir si des éléments de son application peuvent être resserrés après plus d’un an de pandémie et de leçons apprises.
Ça ne doit pas être si stupide que ça, puisqu’en mars, la présidente du Conseil du trésor, Sonia Lebel, a elle-même apporté des modifications au décret d’urgence pour restreindre les contrats de gré à gré que peuvent conclure les établissements de santé.
Après des mois de reconduction de l’état d’urgence, est-ce qu’un débat constructif permettrait de dégager d’autres pistes d’amélioration des décrets ? Probablement. Ça fait partie d’une saine démocratie.
Alors il y a eu la confusion, mais aussi, la gouvernance Facebook peut constituer un piège…