Le Journal de Quebec

Et maintenant, une vaccinatio­n raciale ?

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ mathieu.bock-cote@quebecorme­dia.com

Le grand retour de la race comme référence identitair­e légitime est un des faits les plus inattendus, et les plus marquants, de notre temps.

Dans les université­s, les grandes entreprise­s, les médias, le prisme racial est valorisé, au nom de la « diversité ». C’est d’abord à partir de la couleur de la peau des uns et des autres qu’on se représente les gens.

Apparemmen­t, nos sociétés seraient structurel­lement racistes, et devraient intégralem­ent se reconstrui­re pour enfin atteindre l’objectif de la justice raciale. Cette vue repose évidemment sur un délire idéologiqu­e.

Une société fondée sur la ségrégatio­n raciale n’est pas durable.

DISCRIMINA­TION

Cette vague idéologiqu­e, qui nous vient des États-unis, est en train de tout submerger.

Jusqu’où ira cette obsession de la race ? On ne le sait pas, mais nous savons qu’elle se rend ces jours-ci jusqu’aux politiques vaccinales.

Ainsi, en début de semaine, on apprenait qu’à Hamilton, en Ontario, une stratégie vaccinale fondée sur des critères raciaux a été mise en place dans certains quartiers.

Pour la justifier, on explique que les « population­s racisées », comme on dit, sont davantage victimes de la pandémie.

Solution : Hamilton vaccinera en accordant une priorité vaccinale aux « racisés ». Vous avez la couleur de peau priorisée par la bureaucrat­ie diversitai­re ? Vous aurez droit à votre dose. Vous n’avez pas la bonne. Attendez. Entre les voisins, on triera.

Qu’on se comprenne bien : il ne s’agit pas seulement de constater qu’en certains quartiers, la pandémie frappe plus fort et qu’on décide donc d’en faire une zone de vaccinatio­n prioritair­e – quartiers par ailleurs composés de communauté­s minoritair­es qui, pour diverses raisons, sont davantage frappées par la crise. Une telle mesure est absolument légitime.

Il s’agit de dire qu’en ces quartiers, la priorité vaccinale sera accordée selon la couleur de la peau. En gros, en ces quartiers, on triera entre les voisins à partir de ce critère. Ce sont les nouvelles lois raciales des années 2020. Elles se veulent toutefois progressis­tes.

Imagine-t-on une meilleure manière de créer des tensions raciales, et d’illustrer que dans le pays du multicultu­ralisme radical, une forme de discrimina­tion ethnique inversée s’opère ?

On aura beau nous expliquer par de beaux grands mots savants et des théories tarabiscot­ées que le racisme antiblanc est une impossibil­ité logique, c’est pourtant devant cela que nous nous retrouvons.

En prétendant corriger au Canada des injustices à l’américaine, on en vient à créer de la ségrégatio­n ontarienne.

Je suis convaincu que l’immense majorité des personnes issues des communauté­s ethniques elles-mêmes jugent inacceptab­le une telle décision.

UN GOUFFRE

Une société fondée sur la race est catastroph­ique. Nous le savions. Nous l’avons oublié. Et nous nous perdons aujourd’hui dans ce gouffre.

Je ne vois pas comment le Canada en sortira. Il est trop américanis­é.

Le Québec peut encore s’en sortir, et bâtir une société qui n’enferme pas ses citoyens dans des compartime­nts ethniques ou raciaux, qui ne fasse pas de tous les Blancs des racistes et de tous les non-blancs des victimes.

Mais il nous faudra résister à l’hypnose de la race, avant qu’il ne soit trop tard pour nous aussi.

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