Inconduites dans l’armée
Le ministre de la Défense a annoncé hier un nouveau processus pour traiter les plaintes d’inconduites sexuelles dans l’armée. Malgré la crédibilité de l’ex-juge Louise Arbour qui dirigera l’opération, l’annonce d’hier sent la panique. Très difficile de lui conférer une grande crédibilité.
Les dernières semaines ont été horribles pour le ministre de la Défense. Il s’est perdu dans ses explications depuis que nous avons appris que l’ombudsman de l’armée l’avait informé, il y a trois ans, de l’existence d’allégations graves contre le chef d’état-major.
Au fil des semaines, la tache d’huile n’a fait que s’étendre. Plus on étudie la question, plus on découvre que pas mal de gens étaient au courant, incluant dans l’entourage du premier ministre Justin Trudeau lui-même.
PROCHE DE TRUDEAU
Depuis quelques jours, alors que nous découvrons que la cheffe du cabinet de monsieur Trudeau était aussi au courant, la crise a pris une autre tournure. La cheffe de cabinet est la plus proche conseillère, presque l’alter ego d’un leader politique. Ce qu’elle sait, son patron le sait… sauf dans le cas précis où elle fait le choix délibéré de le garder ignorant d’une histoire.
En résumé, des allégations d’inconduites sexuelles sérieuses pesaient sur Jonathan Vance, le grand patron de la Défense. Ironie inimaginable, ce type avait reçu le mandat dès son entrée en fonction de mettre en place l’opération Honneur. Une opération qui devait réviser le processus de traitement des plaintes, redonner leur honneur aux victimes et mettre fin aux inconduites sexuelles dans l’armée.
Vous imaginez le ridicule. L’homme chargé de la délicate opération a lui-même un historique en matière de comportements sexuels inappropriés. Et il est resté en poste jusqu’en janvier 2021. Même si au plus haut niveau du gouvernement, on a été mis au courant des problèmes à mi-chemin de son mandat.
Pour ajouter au malaise, l’amiral Art Mcdonald, que le gouvernement Trudeau avait nommé comme successeur de Vance, a dû partir pour des motifs similaires. Son mandat n’aura pas duré deux mois. Deux chefs des Forces armées canadiennes faisant euxmêmes l’objet d’une enquête pour des inconduites sexuelles, alors que l’on comptait sur eux pour y mettre fin! Assez gênant.
REPRISE
L’examen des dossiers d’inconduites et de leur traitement, qui a été lancé, hier, constitue la prise 2 d’un même film. C’est essentiellement le mandat qu’avait reçu l’ex-juge Marie Deschamps en 2014. Son travail avait été bien fait et son rapport avait forcé le lancement de l’opération Honneur à la Défense.
Refaire l’exercice n’est pas la réponse à la crise actuelle. Si le premier ministre a vraiment été laissé dans l’ignorance, il aurait dû faire porter la responsabilité politique à son ministre de la Défense et le démettre.
Une femme doit pouvoir faire sa carrière dans l’armée canadienne sans se faire harceler ou abuser. Pour l’instant, l’institution est en déficit de crédibilité pour le garantir. Et le gouvernement Trudeau n’a pas été à la hauteur du « féminisme » dont il se réclame dans le traitement de l’affaire.