Sajjan doit partir
OTTAWA | Le ministre de la Défense nationale, Harjit Sajjan, a perdu l’autorité morale de mener le combat contre les agressions sexuelles dans les Forces armées canadiennes.
Justin Trudeau ferait bien d’en prendre acte le plus rapidement possible. Ce serait la moindre des choses.
Son gouvernement a lamentablement échoué à faire progresser cette cause depuis qu’il a été porté au pouvoir en 2015.
M. Sajjan a annoncé hier le déclenchement d’une autre enquête sur ce fléau qui gangrène l’armée. L’art de pelleter un problème épineux après des élections.
C’est aussi un spectaculaire aveu d’échec.
Cette nouvelle enquête n’est pas nécessaire. Beaucoup a été dit dans le rapport Deschamps, qui a été rendu public il y a six ans.
Les survivantes ont besoin d’un endroit, un « centre indépendant » où se confier et porter plainte à l’extérieur de la chaîne de commandement.
C’était LA principale recommandation à laquelle est arrivée l’ex-juge Deschamps.
On demande maintenant à une autre ex-juge de la Cour suprême, Louise Arbour, de trouver des solutions « concrètes » pour la
« mise en place d’un système de signalement ».
La Défense nationale et le gouvernement Trudeau n’ont-ils rien à proposer, après tout ce temps ?
DU THÉÂTRE
M. Sajjan a eu l’audace d’affirmer que l’heure est à l’action et que les beaux discours ne suffisent plus. Du judo mental d’une étonnante malhonnêteté.
« C’est prendre les gens pour des imbéciles », m’a lancé en entrevue, exaspéré, l’ex-colonel et avocat Michel Drapeau.
M. Sajjan est ministre de la Défense depuis six ans. La cause des femmes dans l’armée n’a pas avancé d’un iota sous son règne.
On pourrait même dire qu’elle a régressé.
Le momentum créé par le rapport Deschamps, dont a découlé l’opération HONOUR, s’est complètement effondré.
COMPLICE
Au lieu de s’attaquer au problème, le gouvernement Trudeau s’est montré complice du statu quo entretenu par les hauts dirigeants des Forces armées canadiennes.
Trois de ses plus hauts gradés sont aujourd’hui visés par des allégations d’inconduites sexuelles, soit l’ex-major général Jonathan Vance, l’amiral Art Mcdonald et le vice-amiral Haydn Edmundson.
On aurait tort d’y voir le signe qu’un ménage est en cours dans les Forces. C’est plutôt en dépit d’elles que la police militaire a ouvert des enquêtes, à la suite de reportages dans les médias.
Que savaient Justin Trudeau, son entourage et son ministre de la Défense des allégations d’inconduites sexuelles visant l’ex-chef des armées Jonathan Vance ?
Probablement plus qu’ils ne voudraient l’admettre.
Justin Trudeau, lui, jure qu’il ne savait rien. Soit. Mais sa plus proche conseillère, Katie Telford, avait été mise au courant. Idem dans le cas de M. Sajjan.
Un joli fait d’armes pour un gouvernement qui se prétend féministe.
Tout cela n’enlève rien au travail remarquable qu’accomplira sans doute Mme Arbour.
En revanche, par son inaction des six dernières années, M. Sajjan a démontré qu’il n’était pas l’homme de la situation.