Le Journal de Quebec

Legault et le monde ordinaire

- RÉMI NADEAU

Qu’est-ce qui vous a agacé le plus, la déclaratio­n de François Legault sur le coût des logements à Montréal, ou les raccourcis qu’il a utilisés pour ensuite s’en défendre ?

Le premier ministre a été ébranlé par les critiques qui ont suivi son estimation du coût de départ pour un logement à Montréal, car elles ont touché une corde sensible : son lien avec les Québécois.

Il sait à quel point la déclaratio­n sur la possible épicerie à 75 $ avec deux ados a mis en lumière la déconnexio­n de Philippe Couillard avec « le vrai monde » en pleine campagne électorale de 2018.

Mais la bourde, si bourde il y a, n’est vraiment pas de la même ampleur.

Le chef caquiste a mis le pied sur la pelure de banane tendue par Manon Massé, qui lui a demandé : « Ça coûte combien, un logement à Montréal ? »

Bien des gens ont bondi en l’entendant répondre : « Je dirais que ça peut peut-être commencer à 500-600 $ par mois, assez rapidement monter à 1000 »

Parce que, en effet, il n’y a pas grand-chose à louer à moins de 600 $ dans la métropole.

Mais, en disant que le prix de départ peut se situer dans cette fourchette, il n’a pas erré. Le Journal a pu trouver quelques exemples le jour même. De rares exemples. Des logements minuscules. Mais, tout de même, pas de doute, ils existent.

Des observateu­rs ont alors imaginé de pauvres gens réduits à y vivre dans un état de misérabili­sme avancé.

C’EST POSSIBLE

Pourtant, il est possible qu’un studio exigu mais propre puisse convenir à des personnes dans différente­s situations.

J’ai personnell­ement habité pendant un an dans un tout petit studio, sans salle de bain fermée, pour me permettre d’économiser, en début de carrière. Il n’y avait qu’un rideau pour assurer un minimum d’intimité à la toilette !

Mais j’étais heureux de voler de mes propres ailes et de devenir journalist­e. Aucun souvenir de m’être noyé dans des larmes en raison de mon logement.

Mais bon, pour revenir au PM, c’est vrai qu’il a été question des étudiants dans l’échange complet avec la coporte-parole solidaire, mais la question était claire : « Ça coûte combien, un logement à Montréal ? »

DÉFENSE PAR L’ATTAQUE

Or, en cherchant à se sortir la tête de l’eau le lendemain, M. Legault a dit une chose et son contraire. Il a commencé par dire qu’il s’excusait s’il n’avait « pas été assez clair ». Il a soutenu qu’il voulait dire en fait que de 500 à 600 $ représenta­it le montant « qu’un étudiant doit penser consacrer par mois pour un logement ».

Mais, puisqu’il admet « que peutêtre ça n’a pas été clair », comment peut-il ensuite prendre un air grave, accusateur, et lancer à Dominique Anglade : « Elle sait très bien que je n’ai jamais dit que ça coûtait 500 par mois pour se loger » ?

C’était si clair, ou ce n’était pas clair ?

Il a davantage eu l’air de quelqu’un qui s’est suffisamme­nt convaincu de sa version des faits pour la défendre par l’attaque.

Comme lorsqu’il a répété, mercredi, pour défendre son ministre de l’éducation, que « toutes les recommanda­tions faites par la Santé publique ont été suivies » concernant le protocole de tests de qualité de l’air dans les écoles.

Alors qu’horacio Arruda confirmait le même jour qu’une « proportion des commentair­es avait été introduite, mais pas tout ».

Pourtant, sa connexion avec les Québécois ne fait pas de doute. Elle explique en partie le respect des consignes malgré les sacrifices exigés par la pandémie.

Elle est bien perceptibl­e à travers l’appui qu’il récolte sondage après sondage.

Mais parce qu’il ne tolère pas que son blason de premier ministre « près du peuple » soit écorché, dans ce casci, il s’est construit une défense qui ne tenait pas la route.

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coût des logements à Montréal.
François Legault était furieux des attaques de l’opposition et du traitement médiatique de sa déclaratio­n sur le coût des logements à Montréal.
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