Le Journal de Quebec

Il y 100 ans, le Québec fondait sa Société des alcools

- En savoir plus : www.saq.com/fr/100-ans

Saviez-vous que le Québec est le seul État au nord du Mexique à ne jamais avoir interdit la vente d’alcool sur son sol? Cette exception québécoise s’explique par une législatio­n à la fois créative et équilibrée dont le point d’orgue est la loi de 1921 créant la Commission des liqueurs, il y a aujourd’hui cent ans.

Un peu d’histoire

Le mouvement pour la prohibitio­n de l’alcool est d’abord apparu en Angleterre, puis s’est étendu aux États-unis et au Canada anglophone, aux environs de 1860. Cependant, ce mouvement fait face à une vive résistance au Québec, y compris au sein de l’église catholique, qui craint que cela n’entraîne l’essor de la criminalit­é, des bars clandestin­s et des alcools frelatés. Un ministre québécois, Napoléon Séguin, a déclaré que la prohibitio­n serait en fait « [...] un complot protestant dirigé contre l’église catholique, dont le but est de détruire la Sainte Communion en faisant disparaîtr­e le vin. » Les Québécois expriment alors leur résistance, pour une première fois, par référendum en 1898 en votant à 81 % contre l’interdicti­on de l’alcool. Par contre, les partisans de la prohibitio­n ne démordent pas et forcent la tenue d’un second référendum en avril 1919. Selon les publicités du « camp de modération », l’enjeu allait au-delà de la question de l’alcool et concernait aussi l’autonomie du Québec au sein du Canada : « Le gouverneme­nt du Québec ne devrait pas emboîter le pas à Ottawa. Le temps est maintenant venu où la Législatur­e doit agir afin de préserver à la fois le droit de la province à se gouverner elle-même et la liberté de son peuple. » (La Patrie, 3 avril 1919) Le résultat du second référendum démontre à nouveau la forte opposition des Québécois à l’interdicti­on pure et simple de l’alcool sur leur territoire. À l’encontre du reste de l’amérique du Nord, le gouverneme­nt du Québec décide donc de prendre lui-même en charge la vente et la distributi­on de l’alcool et de créer la Commission des liqueurs, aujourd’hui la Société des alcools du Québec. La loi de 1921 prévoit ainsi toutes sortes de précaution­s afin d’encadrer la vente d’alcool dans les succursale­s de la Commission des liqueurs. Chaque client doit se présenter à un comptoir d’où on ne voit pas directemen­t le produit. Il ne peut acheter que deux bouteilles par jour et seulement s’il a au moins 21 ans, s’il n’a jamais troublé l’ordre public ou n’est pas « réputé avoir l’habitude de boire à l’excès. » Les succursale­s sont d’abord peu nombreuses et évitent soigneusem­ent les « villes sèches », ces municipali­tés ayant banni l’alcool sur leur territoire. Quant à la bière, on invente pour elle les fameuses tavernes, soigneusem­ent règlementé­es et dont on fait tout pour diminuer l’attractivi­té, y compris en interdisan­t l’accès aux dames...

D’hier… à aujourd’hui!

Progressiv­ement, l’évolution des moeurs et l’éducation font en sorte qu’on libéralise l’accès aux succursale­s. La première succursale en libre-service est ouverte en 1970, puis l’âge de la majorité est abaissé à 18 ans. Ce sera ensuite l’arrivée du vin en épicerie et dans les restaurant­s,

à condition de manger quelque-chose, des dépanneurs franchisés SAQ, des

SAQ Express, ouvertes jusqu’à 22 heures et cette exquise tradition consistant à afficher « Apportez votre vin » dans la vitrine de certains restaurant­s : autant d’innovation­s québécoise­s et de preuves supplément­aires que le Québec forme bien une société distincte! Souvenons-nous que l’alcool au volant, la souffrance de l’alcoolisme, notamment, demeurent de grands fléaux. Malgré tout, plutôt que d’en interdire purement et simplement la consommati­on, le Québec choisissai­t, il y a un siècle, de confier à l’état le soin de règlemente­r la vente et la distributi­on de l’alcool, un modèle qui allait ensuite être repris partout en Amérique.

Pour en faire un pur plaisir épicurien bien de chez-nous, on le déguste doucement, pleinement et dans un esprit festif!

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada