Des experts sont sceptiques quant au projet de la CAQ
Les futures voies réservées sont qualifiées de projet surtout « politique »
Fort sceptiques face à l’intention du gouvernement caquiste d’ajouter plus de 100 km de voies réservées sur les autoroutes et les routes de Québec, des experts en mobilité estiment que ce projet de 844 millions $ obéit d’abord et avant tout à des considérations « politiques ».
C’est ce qui ressort d’échanges avec trois spécialistes interrogés par Le Journal à la suite de la publication de grandes lignes du projet du ministère des Transports pour la desserte des banlieues éloignées de Québec.
Il y a quelques jours, nous apprenions que de nombreuses voies réservées seront ajoutées sur quatre autoroutes qui ceinturent Québec et sur quelques artères du réseau municipal.
« C’est clair qu’il s’agit d’un élargissement d’autoroute qui va contribuer à augmenter la circulation et donc la congestion, puisque ces élargissements augmentent l’offre de mobilité […] Cela va inévitablement aussi contribuer à l’étalement urbain », a affirmé Marie-hélène Vandersmissen, directrice du département de géographie à l’université Laval (UL).
Soutenant que « la solution idéale du point de vue transport et aménagement du territoire aurait sans doute été d’aménager les voies réservées à même les voies actuelles », cette dernière a qualifié la solution retenue de « politique ».
« Tout le monde y trouvera son compte : les automobilistes ne perdent pas de voie autoroutière, au contraire, ils en gagnent une hors heure de pointe, a-t-elle avancé. Et les ménages qui recherchent une alternative à l’auto auront accès à un transport en commun relativement rapide pendant les heures de pointe. »
« LA CHARRUE AVANT LES BOEUFS »
De son côté, Fanny Tremblay-racicot, professeure adjointe à l’école nationale d’administration publique (ENAP) et spécialiste en transport urbain, juge « qu’on met la charrue avant les boeufs » dans ce dossier.
« On annonce des voies réservées, alors qu’il n’y a même pas de service de transport collectif sur ces corridors-là, a-t-elle fait valoir. Pour intervenir en banlieue, on n’est pas obligé d’élargir les voies. »
D’après elle, « on a annoncé le tramway qui dessert uniquement les secteurs des premières banlieues. Puis là, pour contenter cet électorat-là [des banlieues éloignées], on leur dit qu’il y a quelque chose pour vous aussi ».
NE PAS « DÉPLAIRE »
Pour Jean Dubé, professeur à L’UL, « c’est un peu contradictoire. On souhaite donner plus de place à la voiture, mais on se sert du transport en commun pour le faire ».
Ce dernier estime « qu’en développant le transport en commun et les autoroutes, on cherche probablement à ne pas déplaire à grand monde ».