Quand Kennedy coupe le Québec en deux
Oubliez la gauche et la droite, les mondialistes et les nationalistes ou les souverainistes et les fédéralistes.
La nouvelle ligne de fracture qui sépare le Québec oppose deux visions diamétralement opposées de la citoyenneté.
Il y a les citoyens qui se demandent ce qu’ils peuvent faire pour leur pays et ceux qui se demandent ce que leur pays peut faire pour eux.
Bref, les citoyens qui placent les devoirs au-dessus des droits, et ceux qui placent les droits au-dessus des devoirs.
C’est ce que j’appelle « la ligne Kennedy », d’après la fameuse phrase du 35e président des États-unis.
Quand les citoyens placent leurs droits au-dessus de leurs devoirs...
UN MOT : ONTARIO
Dans une pandémie, les uns disent : « Quel sacrifice je peux faire pour aider mon pays à venir à bout le plus rapidement possible de cette crise ? »
Alors que les autres disent : « Qu’est-ce que mon pays peut faire pour que je puisse enfin jouir pleinement de tous mes droits ? »
Samedi, ce sont ces derniers qui sont sortis dans la rue.
On a beau leur répéter sur toutes les tribunes qu’il faut faire chacun son devoir de citoyen pendant encore quelques semaines pour que la vie revienne à la normale et que tout le monde puisse enfin jouir de tous ses droits, ils ne veulent rien savoir ni du cul ni de la tête.
Comme s’il suffisait de dire « Assez, j’en ai assez ! » pour que le virus se rende compte qu’il a effectivement exagéré et qu’il baisse les armes.
Je n’ai qu’un mot pour ces gens : Ontario.
La province d’à côté.
Où 900 patients atteints du virus ont été admis dans les unités de soins intensifs de la province, un nouveau sommet pour celle-ci.
UNE FORCE POLITIQUE ?
Si vous pensez qu’une fois la pandémie derrière nous (grâce à l’effort soutenu des travailleurs de la santé et aux sacrifices consentis par la majorité des citoyens), ces gens vont ranger leurs pancartes, vous rêvez.
Le Parti populaire du Canada de Maxime Bernier et le Parti conservateur du Québec d’éric Duhaime vont les flatter dans le sens du poil (« Oui, on vit sous une dictature, vous avez parfaitement raison ») et leur ouvrir toutes grandes leurs portes, afin de se constituer une base sur laquelle ils pourront ensuite, pensent-ils, grandir.
À l’image du Parti républicain, qui s’est bouché le nez et a serré la main de Trump pour exploiter à son avantage les frustrations (tout à fait légitimes et compréhensibles, cela dit) des laissés-pour-compte de la mondialisation.
Bref, cette ligne de fracture qui est apparue à notre grande surprise pendant la pandémie ne va pas disparaître.
Elle risque au contraire de s’élargir et de se creuser, et de diviser à plus ou moins long terme le Québec en deux.
ENSEIGNER LA CITOYENNETÉ
Remarquez, ce n’est pas mal de revendiquer ses droits.
Qui veut d’un pays où le citoyen devrait se soumettre docilement à un État tout-puissant ?
Mais un pays où les citoyens ne penseraient qu’à leurs droits serait tout aussi déséquilibré.
Et si l’on jetait le cours d’éthique et de culture religieuse aux poubelles pour le remplacer par un cours où l’on enseignerait aux jeunes les droits – et les devoirs – des citoyens ?