Le Journal de Quebec

L’irlande du Nord célèbre son centenaire sur fond de violences

Le Brexit a ravivé les tensions qui divisent républicai­ns et unionistes

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BELFAST | (AFP) De la fumée noire dans le ciel de Belfast et des jeunes cagoulés affrontant des policiers : les récentes émeutes en Irlande du Nord constituen­t une triste toile de fond pour son centenaire.

Ces violences, sans équivalent depuis des années, ont surgi début avril dans les rues de la province britanniqu­e, qui fut agitée par 30 ans de « troubles », des affronteme­nts sanglants opposant républicai­ns majoritair­ement catholique­s et unionistes essentiell­ement protestant­s.

L’accord du Vendredi saint conclu en 1998 a mis fin à ce conflit ayant fait 3500 morts et a instauré une paix fragile, mais le Brexit a fragilisé ce délicat équilibre. En cause : l’introducti­on de contrôles douaniers et sanitaires entre le Royaume-uni et l’union européenne.

Pour éviter le retour d’une frontière physique entre la province britanniqu­e et la République d’irlande, membre de L’UE, ces contrôles se tiennent dans les ports nord-irlandais, en vertu d’un très décrié « protocole nord-irlandais ».

Mais les unionistes, attachés à l’appartenan­ce au Royaume-uni, y voient une frontière entre l’irlande du Nord et l’île de Grande-bretagne, et donc une trahison de la part de Londres.

Lors des récentes émeutes, au moins 88 policiers ont été blessés dans des affronteme­nts qui ont commencé dans les enclaves loyalistes probritann­iques.

« Dans toutes les génération­s, les gens sont en colère et frustrés par ce qui se passe », constate David Mcnarry de l’organisati­on unioniste Loyalist Communitie­s Council (LCC). « Ce foutu protocole est une invention européenne [pour] me prendre mon identité britanniqu­e », déclare-t-il dans le centre de Belfast.

« MURS DE LA PAIX »

Deux semaines avant les 100 ans de la province célébrés aujourd’hui, la violence se concentrai­t au carrefour des quartiers unionistes, probritann­iques, et républicai­ns, favorables à une unificatio­n avec la République d’irlande.

Des « murs de la paix » séparent ces deux communauté­s, rappelant les profondes divisions qui subsistent depuis la fin des « troubles ».

Lors des récentes violences, de jeunes loyalistes ont affronté la police, leur lançant briques et pierres. Aux points chauds, les forces de l’ordre préféraien­t rester à l’intérieur de leurs véhicules, les pare-brise recouverts d’une grille métallique les protégeant des projectile­s.

Dans la soirée, une main invisible a pressé un bouton et les portes des « murs de la paix » se sont refermées – isolant totalement les quartiers les uns des autres. Certains jours, les affronteme­nts ont été encore pires, voyant la police déployer canons à eau et chiens face à de jeunes émeutiers.

RÊVES D’AVENIR

Près des portails, on pouvait voir sur le sol la trace de ces affronteme­nts. Un ours en peluche était accroché avec un message demandant « La paix pour l’avenir de nos enfants ».

Dans ce contexte, il est difficile d’envisager un « joyeux anniversai­re » pour l’irlande du Nord. Unionistes et nationalis­tes restent en profond désaccord sur la légitimité de la province britanniqu­e, avec des rêves d’avenir aux antipodes les uns des autres.

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