Le Journal de Quebec

Un examen de français à distance qui ne fait pas l’unanimité

- DAPHNÉE DION-VIENS

L’épreuve uniforme de français au collégial se déroulera en ligne et à distance pour la toute première fois la semaine prochaine, une formule controvers­ée qui ouvre la porte à la tricherie et aux iniquités, selon des étudiants et enseignant­s qui réclament son annulation, comme ce fut le cas lors des deux dernières sessions.

Des enseignant­s provenant d’une dizaine de cégeps de même que cinq associatio­ns étudiantes locales en ont fait la demande au ministère de l’éducation. Une pétition à ce sujet vient de récolter plus de 4400 signatures au moment d’écrire ces lignes.

Richard Berger, un enseignant de français à la retraite, est « très préoccupé » par la situation puisque les tricheurs seront « plus nombreux que jamais, selon lui. Seuls les étudiants honnêtes seront susceptibl­es d’échouer », affirme-t-il.

« N’IMPORTE QUOI »

Pour assurer l’intégrité de l’épreuve, les étudiants devront signer une déclaratio­n sur l’honneur. Le ministère de l’éducation s’est aussi doté d’un logiciel anti-plagiat, capable de détecter des passages d’un texte qui ont été copiés à partir du web.

Mais puisque l’examen peut être fait à la maison, rien n’empêche un étudiant d’obtenir l’aide d’une amie qui excelle en français ou d’une cousine qui détient une maîtrise en littératur­e. « Et ça va se faire, puisqu’il y a déjà énormément de tricherie. Je m’attends à ce que ce soit n’importe quoi », laisse tomber M. Berger.

D’autres enseignant­s, comme Christian Bernier du cégep de l’outaouais, craignent par ailleurs que des difficulté­s techniques ne surviennen­t.

Québec a demandé à tous les cégeps de mettre gratuiteme­nt à la dispositio­n des étudiants un logiciel de correction, mais la version en ligne rendue disponible « plante à tout bout de champ », si bien que « les étudiants ont beaucoup de difficulté à y accéder », affirme l’enseignant.

Le ministère a aussi demandé aux cégeps de mettre des locaux à la dispositio­n de tous les jeunes qui préféreron­t se rendre sur le campus pour faire l’examen, mais des étudiants en isolement seront forcés de rédiger l’épreuve à la maison, sans soutien technique en cas de pépin, souligne Anaïs Morin, une étudiante du cégep de Rimouski qui a initié la pétition. « C’est ça qui est le plus problémati­que », affirme-t-elle.

« MESURE TRANSITOIR­E »

Au ministère de l’éducation, on affirme que la passation de cet examen en ligne est « une mesure transitoir­e dans un contexte exceptionn­el ».

L’épreuve virtuelle n’est toutefois pas le fruit d’un travail improvisé puisque « le projet d’informatis­er les épreuves était déjà en branle » avant la pandémie, indique son porte-parole, Bryan St-louis. Tout a été mis en place pour que l’épreuve se déroule dans les meilleures conditions possibles, assure-t-il.

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