Le Journal de Quebec

Comment se fait-il qu’on en soit rendu là ?

- louise.deschatele­ts@quebecorme­dia. .co

LOUISE DESCHÂTELE­TS

À l’égal de plusieurs, le nombre de féminicide­s survenus au Québec au cours des derniers mois me sidère. Comment se fait-il que des femmes puissent encore se laisser séduire par des individus qui les méprisent, les violentent et les frappent ? Comment se fait-il que certains hommes se sentent encore détenteur d’un tel pouvoir sur leur femme pour s’arroger le droit de vie ou de mort sur elle ?

J’ai plus de 70 ans et ça fait depuis les années 60 que j’ai pris conscience de l’importance de se respecter comme femme si je veux être respectée par les hommes. Et quand on se respecte, on n’accepte pas que quiconque nous blesse en paroles ou en gestes, fût-il notre mari, notre conjoint ou notre chum.

Tout comme elle avait enseigné à mon frère à me considérer comme son égale, ma mère m’avait enseigné à me respecter, elle qui avait quitté un mari alcoolique à une époque où ça ne se faisait pas, pour ne pas contaminer ses enfants et pour se respecter ellemême. Je me respecte et mon frère respecte sa femme ainsi que toutes les autres femmes. On a encore tout un chemin à parcourir au Québec pour que tout le monde pense comme ça !

Anonyme

Au-delà du grave problème sanitaire qu’on traverse depuis plus d’un an, la situation semble vouloir mettre en lumière un gros pan caché et peu reluisant des relations hommes/femmes chez nous. Vous avez eu la chance d’avoir une mère qui avait compris le principe du respect mutuel dans le couple et qui était de plus dotée d’une force de caractère basée sur un respect d’ellemême peu commun à l’époque où elle a pris ses enfants sous le bras pour fuir un milieu familial toxique.

Malheureus­ement, toutes les femmes québécoise­s n’étaient pas et ne sont pas encore bâties sur un tel moule. Il va en falloir des efforts pour mettre tout le monde à niveau sur ce plan. Les hommes comme les femmes. Car ne nous y trompons pas, c’est à travers l’éducation que nous parviendro­ns à transmettr­e aux membres des deux sexes que chacun a son rôle à jouer pour éradiquer ce genre de drame dans notre société. Comme l’a dit notre premier ministre : « Il n’y a rien de viril à être violent avec les femmes. Au contraire, je trouve ça lâche ! »

Il faudrait également insister, à l’intention des filles, sur le fait qu’il n’y a rien de valorisant ni de respectabl­e à se laisser bousculer en paroles ou en gestes par quelqu’un qui prétend t’aimer. J’apprécie d’ailleurs beaucoup que certains scénariste­s à la télé osent présenter des cas de violence conjugale pour permettre aux victimes de se reconnaîtr­e et éventuelle­ment de voir que ce n’est pas normal, et qu’il faut s’en soustraire, au lieu de voir ce genre d’attitude comme une preuve d’amour, alors que c’est une preuve de volonté de prise de possession inacceptab­le.

De la nécessité de dépasser les belles paroles

Plusieurs femmes ont été tuées dernièreme­nt par leur conjoint, et tout le monde, premier ministre, politicien­s, journalist­es, et citoyens inclus sont montés aux barricades pour dénoncer ces horribles faits. Mais aussitôt le budget déposé, les maisons d’hébergemen­t n’ont eu d’autre choix que de monter de nouveau aux barricades pour dénoncer le peu d’effort financier du gouverneme­nt pour les aider. Combien de temps et combien de décès de femmes ça va prendre pour que les bottines suivent enfin les babines, et le portefeuil­le les besoins ?

Une qui a envie que ça change

Je comprends votre empresseme­nt à vouloir que les choses changent en matière de violence conjugale, mais ça ne se fera pas d’un coup. L’important c’est qu’une sérieuse prise de conscience soit faite et que les sonneurs d’alerte restent aux aguets pour continuer à revendique­r. Déjà, on a vu le gouverneme­nt rajuster le tir.

Quand on donne la vie à un enfant, on est devant lui comme un débiteur devant son créancier.

– Émile Fabre

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