Il était plus que temps d’agir
Depuis 1974, le français est officiellement la langue officielle du Québec. Au fil des ans, il y a eu des pas en avant et des reculs dans notre tentative de donner tout son sens à cette notion. La loi 101 a certainement représenté le pas de géant sur ce parcours.
Cinquante ans plus tard, j’ai le sentiment que nous complétons le travail. Lorsque l’assemblée nationale adoptera le nouveau projet de loi 96, le peuple québécois établira que le français est pleinement la langue officielle du Québec.
Dans ce projet de loi, le Québec agit sans complexe. C’est un peuple mature qui parle. Pas dans la recherche d’une confrontation, pas dans la provocation. Juste une société qui, consciente de ses échecs, de ses hésitations et de son histoire, décide de prendre les moyens d’assurer la pérennité de sa langue, le socle de son identité.
Le français comme langue officielle est affirmé sans complexe
URGENCE
Il était plus que le temps d’agir cependant. Le portrait de situation est véritablement alarmant. Personnellement, je dois confesser avoir minimisé pendant un certain temps la menace à l’avenir du français. J’avais confiance en la loi 101. Or, les données compilées dans la dernière décennie m’ont amené à voir l’urgence.
Les récents rapports de l’office de la langue française décrivent le recul du français comme langue d’usage, au travail comme dans les commerces. Notre Bureau d’enquête a démontré la probabilité d’être servis en anglais dans les commerces montréalais.
Et le réputé démographe Charles Castonguay a expliqué le recul rapide du français dans son livre publié cet hiver.
Ne pensons qu’au fait que plus de la moitié des Montréalais n’auront plus le français comme langue d’usage dans environ une dizaine d’années.
Montréal accueille la grande majorité des nouveaux arrivants. Comment espérer les intégrer au français ? Un immigrant ne s’intègre jamais à la langue de la minorité.
Le français est déjà une langue minoritaire au Canada et très minoritaire en Amérique du Nord, si elle devient minoritaire à Montréal, aussi bien dire qu’on l’enterre. François Legault rappelait hier le devoir de tout gouvernement du Québec de protéger la langue dans ce contexte périlleux.
AFFIRMATION FORTE
Le gouvernement a décidé de poser un geste fort en inscrivant le caractère français du Québec dans la Constitution canadienne. Geste symbolique, certes, dont on ne saisit pas encore toutes les implications juridiques. Mais le symbole est puissant.
Le Québec a recours à une disposition peu utilisée pour inscrire au coeur de la Constitution deux choses simples, mais lourdes de portée. Le Québec forme une nation. Le français est la langue officielle et commune de cette nation. Bravo !
Ce geste ne plaira pas à tout le monde au Canada, mais il constitue un exemple puissant d’affirmation. Après les déceptions et les échecs constitutionnels, voir le Québec se tenir debout et s’affirmer fait du bien.
Les députés de tous les partis feront leur travail normal d’étude et d’amélioration du projet de loi. Mais à la fin, l’assemblée nationale n’a pas droit à l’échec.