Le Journal de Quebec

Des profits records en pleine pandémie

Pas moins de 338 grandes entreprise­s canadienne­s ont bénéficié de la subvention salariale d’urgence

- OLIVIER BOURQUE

La pandémie a mis l’économie mondiale par terre, mais cela n’a pas empêché une cinquantai­ne de grandes sociétés canadienne­s de réaliser des profits records.

Selon un rapport publié par Les Canadiens pour une fiscalité équitable, plusieurs d’entre elles ont pu profiter d’un taux d’imposition anormaleme­nt bas, de paradis fiscaux et, fait étonnant, certaines ont même touché l’aide gouverneme­ntale d’urgence.

De ces 50 entreprise­s qui ont rapporté des profits records, c’est la compagnie d’assurance Manuvie qui trône en haut du classement avec des bénéfices de 5,9 milliards $ en 2020.

L’entreprise a payé un taux d’imposition de 18 % alors qu’elle avait au moins une filiale identifiée dans les paradis fiscaux, rapporte l’étude.

AIDE DE 50 M$ POUR COUCHE-TARD

Situation presque similaire pour le géant québécois des dépanneurs, Couche-tard. L’entreprise fondée par Alain Bouchard a réalisé des profits de 3,7 milliards $ l’an passé avec un taux d’imposition de 20 %.

Rappelons que le taux statutaire des grandes entreprise­s est de 26,5 % au Québec, ce qui inclut l’impôt fédéral et provincial.

Mais Couche-tard a également reçu la subvention salariale d’urgence du gouverneme­nt fédéral (SSUC). Cette subvention permet à l’entreprise de réembauche­r des travailleu­rs, d’éviter d’autres pertes d’emplois et de faciliter la reprise des activités.

Selon les derniers états financiers, l’entreprise a touché 50 millions $ de cette aide. Contactée par Le Journal, l’entreprise affirme que la subvention est « destinée à ses travailleu­rs de première ligne ».

« Les fonds seront entièremen­t alloués à la protection de l’emploi et à la rémunérati­on d’appréciati­on, aux programmes de développem­ent de carrière et au maintien des mesures de santé et de sécurité. Tout au long de la crise de COVID-19, Couche

Tard a joué un rôle critique en demeurant ouvert et en fournissan­t des services essentiels aux communauté­s », a indiqué Couche-tard par courriel.

BAS TAUX D’IMPOSITION POUR POWER

Autre exemple, le plus grand producteur de gaz naturel canadien, Tourmaline Oil, a aussi publié des profits records, tout en ne payant pas d’impôts, et a même touché la SSCU.

Le holding Power Corporatio­n, propriété de la famille Desmarais, n’a pas touché la subvention salariale, mais a rapporté des profits records de plus 2 milliards $, tout en payant un taux d’imposition de seulement 2 % et en bénéfician­t d’au moins une filiale dans des paradis fiscaux.

« Il est très problémati­que que des dizaines des plus grandes sociétés canadienne­s aient pu améliorer leurs résultats et envoyer plus d’argent aux actionnair­es, tout en réduisant d’une manière ou d’une autre leurs factures d’impôts », a souligné l’économiste D.T. Cochrane, qui a réalisé l’étude.

Le groupe demande davantage de transparen­ce de la part des grandes entreprise­s, mais aussi d’ottawa afin de savoir où va l’aide en temps de pandémie.

SUBVENTION ET ACQUISITIO­NS

Selon une enquête du quotidien Globe and Mail, 388 grandes entreprise­s canadienne­s ont touché la SSCU lors des derniers mois, pour un montant global de 3,6 milliards $ en janvier dernier.

Cette liste comprend des joueurs majeurs comme Air Canada, Bell, Suncor, Transat, CAE, Imperial Oil et Snc-lavalin.

Mais un des plus importants bénéficiai­res a été le géant québécois de la logistique et du transport TFI Internatio­nal, ancienneme­nt Transforce, qui a vu ses profits grimper l’an passé.

En 2020, l’entreprise a aussi effectué 13 acquisitio­ns, notamment une partie de UPS, et a versé des dividendes à ses actionnair­es chaque trimestre.

Malgré tout, TFI Internatio­nal et ses filiales ont reçu un montant de 75 M$ en aide gouverneme­ntale durant la pandémie.

 ?? PHOTO D’ARCHIVES, CHANTAL POIRIER ?? Le siège social de Couche-tard, à Laval. L’entreprise québécoise a touché 50 M$ en subvention salariale, en 2020, tout en engrangean­t des profits de 3,7 milliards $.
PHOTO D’ARCHIVES, CHANTAL POIRIER Le siège social de Couche-tard, à Laval. L’entreprise québécoise a touché 50 M$ en subvention salariale, en 2020, tout en engrangean­t des profits de 3,7 milliards $.

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