Le constructeur leur demandait 50 000 $ de plus
…mais ils ont gagné en justice
Après l’explosion des prix, la disponibilité des matériaux – et non plus seulement du bois – est devenue en quelques semaines à peine la principale menace qui pèse actuellement sur la saison de la construction au Québec.
« Habituellement, c’est plein jusqu’en haut, s’exclame comme pour s’excuser, dès notre arrivée, le conseiller d’un entrepôt Home Depot devant les tablettes dégarnies de panneaux de gypse. Rien qu’à voir, vous comprenez que l’on est en pénurie. Je vous jure que ce n’est pas comme cela normalement. »
Bref, que vous ayez de grands besoins de contreplaqués, de fenêtres, de panneaux de gypse, d’articles de plomberie, de béton ou même de bardeaux d’asphalte, l’heure est sans doute venue de vous armer de patience. Ou encore, d’accepter que l’on vous souhaite bonne chance !
UNE PORTE ET DES MURS…
Car, à l’instar du reste de l’amérique du Nord, le Québec doit composer avec une pénurie de matériaux de construction, qui excède maintenant celle du bois d’oeuvre qui a abondamment fait les manchettes au cours des derniers mois.
Résultats : détaillants et entrepreneurs ne comptent plus les avis de leurs fournisseurs les informant de nouveaux délais et mesures de rationnement sur les volumes de commande. Mathieu Clément, un entrepreneur en construction de Pincourt, en banlieue de Montréal, soutient qu’il faut compter un minimum de quatre semaines pour recevoir du gypse.
« On s’est battu pour avoir du bois. Maintenant que les charpentes sont montées, on aimerait bien être capable de mettre du gypse sur les murs pour finir le travail, illustre le vice-président de l’association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec, François Bernier. Une maison avec une porte et des murs, ça ne me paraît pas trop demander ! »
LA CROISSANCE ET LE ROBINET
La forte hausse de la demande qu’a connue le secteur de l’habitation depuis un an, combinée à l’incapacité des manufacturiers de s’ajuster suffisamment rapidement à cette explosion que nul n’avait prévue, explique pourquoi nous nous retrouvons dans pareille situation, affirme l’économiste principale de Desjardins, Joëlle Noreau.
« Les ménages se sont enrichis, ils ont eu envie de revoir leur lieu de vie et ont profité en masse de la faiblesse des taux hypothécaires. Le hic, poursuit-elle, est qu’une usine, ça ne fonctionne pas avec un robinet. On ne peut pas décider d’augmenter sa production, du jour au lendemain, au gré de la demande. »
Voilà le genre de défis auxquels sont confrontées ces jours-ci nombre d’entreprises manufacturières. Elles tentent de répondre à l’explosion de la demande de matériaux qui leur vient d’entrepreneurs en construction.
C’est le cas, comme pour d’autres, de Vaillancourt Portes et Fenêtres, située à Saint-germain-de-grantham.
La demande est telle que l’entreprise de 225 employés a enregistré la semaine dernière des ventes équivalant à 250 % de sa capacité.
« C’est certain qu’on aimerait accroître notre production en conséquence. C’est notre rêve, explique Martin Stébenne, directeur des ventes de Vaillancourt. Mais il faudrait pour cela trouver la main-d’oeuvre, laquelle se fait tout aussi rare. »
JOUER D’ASTUCE ET D’INTUITION
C’est là le genre de difficultés qui, ajoutées à des événements imprévisibles, comme une vague de froid au Texas (siège de l’industrie du polymère aux États-unis), finissent par affecter toute l’industrie de la construction du continent.
« Faute de mieux, la plupart des entrepreneurs avancent leurs chantiers à pas de tortue. D’autres reportent leurs échéanciers », se désole le PDG de la Corporation des entrepreneurs généraux, Éric Côté.