Des rêves sur pause...
La pandémie mondiale a un impact majeur sur la carrière des artistes québécois à l’étranger
Ce n’est pas d’hier que les artistes québécois entretiennent le rêve, souvent très tôt dans leur carrière, de vouloir exporter leur humour, leur musique, leur talent. Aujourd’hui, de Messmer à Kim Gingras, en passant par Isabelle Boulay et Coeur de Pirate, les artistes de chez nous sont très nombreux à briller à l’international. Mais l’impossibilité de voyager durant la pandémie les a complètement freinés, et pour certains, l’impact d’une longue absence en territoire étranger sera grand sur leur carrière en dehors de nos frontières.
« Pour moi, tout sera à recommencer », confie Jérémy Demay à l’autre bout du fil.
Humoriste d’origine française qui est ironiquement connu ici, mais pas du tout en France, Jérémy Demay avait décidé, avant la pandémie, qu’il était temps pour lui d’aller conquérir son territoire natal. « J’avais envie d’un nouveau terrain de jeu », explique-t-il.
Il avait fait quelques apparitions à la télé, entre autres à Surprise sur prise sur France 2, puis commençait à écumer les petites salles et les « comédies club ». Mais, ce n’était pas assez pour s’être inscrit dans la mémoire et qu’on se souvienne de lui après un an et demi d’absence, explique-t-il.
Si la situation le permet, Jérémy Demay retournera passer tout l’automne en France pour présenter son spectacle Enfin vivant et recommencer le travail. « Un ‘‘show’’ qui s’appelle Enfin vivant après une pandémie mondiale, c’est presque un coup marketing », se réjouit-il en riant.
Mariana Mazza avait également déjà commencé à semer quelques graines du côté européen. Mais comme pour Jérémy Demay, « tout va être à refaire à nouveau là-bas », indique son producteur, Éric Young, du Groupe Entourage, qui voit grand en Europe pour sa protégée.
« Mariana devant lancer son spectacle à L’européen (une salle parisienne) après quelques séjours où on l’avait présentée aux gens du milieu de la télé. Elle avait fait la première partie de Messmer durant neuf soirs à l’olympia de Paris. Avec sa nouvelle tournée ici, son film Maria et ses autres projets, ce sera difficile d’y aller à l’automne. On regarde pour y retourner à l’automne 2022. Ça retarde le projet de plus de deux ans. Ce n’est pas rien », soulève Éric Young.
Et une percée à l’étranger, « ça ne s’improvise pas, ajoute-t-il. Ça se prépare plusieurs mois, années d’avance ».
L’IMPORTANCE DES RÉSEAUX SOCIAUX
La pandémie a aussi mis les freins à des artistes musicaux comme le duo pop Kingdom Street, qui juste avant la pandémie, a signé un contrat de disque avec Columbia, une filiale de Sony. Mais la pandémie a empêché Paméla Lajoie et Patrick Donovan de s’y rendre à l’automne pour faire la promotion entourant le lancement de cette chanson.
« C’est important de se faire voir par les gens du milieu, et on n’a pas pu », raconte Patrick Donovan.
Mais les artistes musicaux ont un avantage sur les humoristes, estime-t-il, puisque leur musique peut continuer à jouer sur les radios là-bas et ainsi s’ancrer dans la tête des gens, tandis qu’un humoriste doit impérativement être présent sur scène.
« Nous, on a réussi à accumuler une bonne communauté sur les réseaux sociaux avec l’aide d’une youtubeuse française. Ça nous a apporté plusieurs milliers de nouveaux abonnés », explique-t-il.
Si le ballon des rêves internationaux s’est dégonflé pour les artistes en début de carrière outre-mer, la pandémie a aussi été un frein même pour les Québécois les plus connus en territoire étranger.
PARTIE REMISE
Vedette en France, Jean-marc Généreux explique que la pandémie a agi comme un « gros frein à main » sur tous ses projets européens. « Ils ont annulé Danse avec les stars, j’avais une fiction qui s’en venait, on parlait d’un ‘‘one-man-show’’… Ça n’a pas mis du sable dans l’engrenage, ç’a mis du béton dans l’engrenage », souligne le chorégraphe coloré.
« Il y a trois éléments quand tu veux aller travailler à l’international, détaillet-il. Ça prend un justificatif de ton pays, ça prend un pays qui veut recevoir des gens, et ça prend des projets. Avec la pandémie, ç’a tout pourri. Mettons que le projet peut continuer, mais que les deux pays ne s’entendent pas pour les entrées et les sorties des frontières ? C’est tout un questionnement. »
Les artistes questionnés par Le Journal ne croient pas que la pandémie aura un impact à long terme sur le déploiement de nos talents à l’international. « Ce n’est que partie remise », souligne la moitié de Kingdom Street, Patrick Donovan.