Le Journal de Quebec

Un code d’éthique difficile à changer

- CHARLES LECAVALIER

Le code d’éthique n’avait pas prévu la nouvelle génération de politicien­s-entreprene­urs, mais c’est surtout l’intransige­ance de l’ex-ministre de l’économie qui a causé sa perte, selon des experts.

« Le premier ministre doit se mordre les doigts de ne pas avoir donné plus d’importance par le passé à cette affaire. C’est le quatrième rapport de la commissair­e. Il a eu le temps de voir la balle venir, et là, il était coincé », lance le politologu­e Denis Saint-martin, professeur à l’université de Montréal et spécialist­e des questions de gouvernanc­e et de l’éthique parlementa­ire.

Après plusieurs tentatives de médiation, la commissair­e à l’éthique offrait deux choix au ministre : vendre, ou se retirer.

Il a choisi de démissionn­er. François Legault dit regretter la situation, et veut moderniser le code.

Des gens d’affaires sont montés au front. Le président de la chambre de commerce du Montréal Métropolit­ain, Michel Leblanc a déploré « qu’on se prive de son expertise pour des raisons politiques ».

Pour M. Saint-martin toutefois, la question n’est pas aussi simple : « A posteriori, on peut dire qu’il faut adapter le code, car d’autres businessma­ns pourraient vouloir se joindre au club des businessma­ns du gouverneme­nt. […] ».

« IL A ÉTÉ NÉGLIGENT »

Cette pression, dit-il, on la voit partout en occident, car le profil des politicien­s change, et « on voit de plus en plus de gens très riches en politiques ». « Mais Pierre Fitzgibbon aurait dû savoir que ce code existait avant de se lancer en politique. Il a été négligent », dit-il.

L’éthicien René Villemure croit également que Pierre Fitzgibbon a été son pire ennemi dans cette histoire, en envoyant paitre la commissair­e dans ses premiers rapports. « Se faire envoyer promener à deux reprises ne pose pas les bases d’une relation saine », laisse-t-il tomber.

PAS « D’EXCEPTION FITZGIBBON »

Il craint que le conflit envoie le message aux gens d’affaires qu’ils ne sont pas les bienvenus en politiques. Mais d’un autre côté, il ne peut pas y avoir « d’exception Fitzgibbon ».

« La commissair­e est rigoureuse, elle fait du bon travail, et elle applique le code. Il n’est pas désuet, mais il n’a pas prévu la situation d’un politicien investisse­ur. Il est sain de se poser la question d’une modificati­on », dit M. Villemure.

Sauf que dans le débat parlementa­ire actuel, où l’éthique est utilisée par les partis d’opposition comme un outil pour « faire des jambettes », et où Pierre Fitzgibbon, maintenant député, continue de s’en prendre à cette loi « d’une autre époque », les discussion­s risquent d’être stériles.

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