Un code d’éthique difficile à changer
Le code d’éthique n’avait pas prévu la nouvelle génération de politiciens-entrepreneurs, mais c’est surtout l’intransigeance de l’ex-ministre de l’économie qui a causé sa perte, selon des experts.
« Le premier ministre doit se mordre les doigts de ne pas avoir donné plus d’importance par le passé à cette affaire. C’est le quatrième rapport de la commissaire. Il a eu le temps de voir la balle venir, et là, il était coincé », lance le politologue Denis Saint-martin, professeur à l’université de Montréal et spécialiste des questions de gouvernance et de l’éthique parlementaire.
Après plusieurs tentatives de médiation, la commissaire à l’éthique offrait deux choix au ministre : vendre, ou se retirer.
Il a choisi de démissionner. François Legault dit regretter la situation, et veut moderniser le code.
Des gens d’affaires sont montés au front. Le président de la chambre de commerce du Montréal Métropolitain, Michel Leblanc a déploré « qu’on se prive de son expertise pour des raisons politiques ».
Pour M. Saint-martin toutefois, la question n’est pas aussi simple : « A posteriori, on peut dire qu’il faut adapter le code, car d’autres businessmans pourraient vouloir se joindre au club des businessmans du gouvernement. […] ».
« IL A ÉTÉ NÉGLIGENT »
Cette pression, dit-il, on la voit partout en occident, car le profil des politiciens change, et « on voit de plus en plus de gens très riches en politiques ». « Mais Pierre Fitzgibbon aurait dû savoir que ce code existait avant de se lancer en politique. Il a été négligent », dit-il.
L’éthicien René Villemure croit également que Pierre Fitzgibbon a été son pire ennemi dans cette histoire, en envoyant paitre la commissaire dans ses premiers rapports. « Se faire envoyer promener à deux reprises ne pose pas les bases d’une relation saine », laisse-t-il tomber.
PAS « D’EXCEPTION FITZGIBBON »
Il craint que le conflit envoie le message aux gens d’affaires qu’ils ne sont pas les bienvenus en politiques. Mais d’un autre côté, il ne peut pas y avoir « d’exception Fitzgibbon ».
« La commissaire est rigoureuse, elle fait du bon travail, et elle applique le code. Il n’est pas désuet, mais il n’a pas prévu la situation d’un politicien investisseur. Il est sain de se poser la question d’une modification », dit M. Villemure.
Sauf que dans le débat parlementaire actuel, où l’éthique est utilisée par les partis d’opposition comme un outil pour « faire des jambettes », et où Pierre Fitzgibbon, maintenant député, continue de s’en prendre à cette loi « d’une autre époque », les discussions risquent d’être stériles.