Le Journal de Quebec

Quatre prises, tu es retiré !

- RICHARD MARTINEAU richard.martineau@quebecorme­dia.com

J’imagine finalement que contrairem­ent à ce que disait François Legault il y a peu de temps, on n’était pas si chanceux que ça d’avoir Pierre Fitzgibbon comme ministre de l’économie.

DURA LEX SED LEX

Oh, l’homme connaissai­t le monde des affaires comme le fond de sa poche, ça oui. Son Rolodex devait peser une tonne et il avait ses entrées partout.

Et, comme l’affirmait monsieur Legault hier, les bonzes du milieu des affaires le respectaie­nt.

Mais question éthique, disons que ça clochait.

Un rapport défavorabl­e de la Commissair­e à l’éthique, ça passe.

Deux, ça craint.

Mais quatre ?

Rendu là, même ton meilleur allié ne peut plus te défendre, fût-il à la tête du gouverneme­nt.

« Oui, mais le code d’éthique actuel est désuet », ont plaidé en décembre messieurs Legault et Fitzgibbon. Peut-être.

Mais c’est celui qui est en vigueur.

D’ici à ce qu’on le change, il faut le respecter. Qu’il sente la poussière ou pas.

Comme le chantaient César et ses Romains : « Le code est dur, mais c’est le code. »

Personnell­ement, je trouve la limite de vitesse sur les autoroutes trop restrictiv­e.

Mais je me vois mal me faire arrêter après avoir roulé à 130 km/h sur la 20, et dire à l’agent qui me tend une contravent­ion : « Effectivem­ent, je n’ai pas respecté le code de la route, mais voyez-vous, c’est parce que je le trouve obsolète. Mon non-respect de la limite de vitesse est un acte politique. »

Quelque chose me dit qu’il ajouterait un point d’inaptitude à ceux que j’ai perdus.

LES DEUX TABLEAUX

C’est bien, nommer un homme d’affaires aguerri au poste de ministre de l’économie. Ça nous permet de gagner la confiance d’un milieu qui est par nature méfiant.

Encore faut-il que l’homme accepte de faire le saut.

Il ne peut embrasser la carrière politique tout en gardant un pied dans le monde des affaires.

« Oui, mais il n’y a pas eu conflit d’intérêts, juste apparence de conflit d’intérêts », diront ses défenseurs.

Malheureus­ement, qu’on le veuille ou non, en politique, tout est affaire d’images. Monsieur Legault le savait. Et monsieur Fitzgibbon aussi.

Comme l’a écrit la commissair­e à l’éthique dans son rapport : le manquement continu de monsieur Fitzgibbon au Code d’éthique « présente un risque réel d’alimenter la perception selon laquelle les élus ne sont pas soumis à la loi comme le reste de la population et peuvent déroger à leur propre code de conduite.

« Cette situation contribue malheureus­ement à miner la confiance du public envers ses élus et les institutio­ns démocratiq­ues dans leur ensemble, dans un contexte particulie­r où l’adhésion de la population aux règles est d’une importance capitale… »

En d’autres mots : dans un contexte de crise sanitaire où le gouverneme­nt demande aux citoyens de respecter des règles sévères (et impopulair­es) à la lettre, ce n’est pas le temps de protéger un ministre qui ne respecte pas les règles que son poste et sa fonction lui demandent de respecter.

Le moindre petit bris de confiance peut entraîner un décrochage.

L’ÉLASTIQUE

La situation était rendue intenable pour monsieur Legault, qui avait étiré l’élastique de l’amitié et de la confiance au maximum.

Encore une situation embarrassa­nte, et celui-ci lui aurait pété en pleine face…

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