Le Journal de Quebec

Les pluies acides intellectu­elles viennent aussi de la droite

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Le wokisme n’est pas le seul courant intellectu­el américain qui ait des retombées indésirabl­es chez nous et son influence pâlit si on la compare à certains courants de droite.

Les courants d’idées américains ont toujours été influents chez nous, parfois pour le meilleur, souvent pour le pire.

Le dernier en date est le wokisme, auquel on reproche quelques dérailleme­nts récents, qui en révèlent plus sur le manque de courage de certains administra­teurs universita­ires que sur son influence réelle.

Pendant que l’attention est attirée à gauche, il se passe des choses à droite.

INFLUENCES TRUMPISTES

L’ex-président américain n’a pas la cote chez nous – tant mieux ! – mais ses idées font néanmoins leur petit bonhomme de chemin dans notre pensée politique. On pense notamment à l’opposition primaire au progressis­me, au multicultu­ralisme et à la mondialisa­tion, au complotism­e, à la tolérance pour certains mouvements politiques antilibéra­ux ou certains régimes autoritair­es.

Au sein du nationalis­me québécois, ces influences restent minoritair­es, mais elles sont aux antipodes du progressis­me, de l’ouverture sur le monde, du rationalis­me et de l’adhésion inconditio­nnelle aux valeurs démocratiq­ues et pluraliste­s qui animaient notamment les René Lévesque, Jacques Parizeau et Bernard Landry.

L’AUTRE DROITE DOCTRINAIR­E

Si le trumpisme est relativeme­nt nouveau et n’a que peu de prise sur les cercles du pouvoir, il en va autrement d’un autre courant de droite américain dont l’influence sur la droite canadienne et québécoise est plus profonde.

Ce courant conservate­ur libertarie­n doctrinair­e est solidement installé dans les milieux intellectu­els et universita­ires américains, où il est généreusem­ent financé par des idéologues multimilli­ardaires.

Depuis plusieurs décennies, la Fondation Koch a « investi » avec succès dans l’institutio­nnalisatio­n de ce courant, non seulement en fondant des instituts universita­ires qui sont devenus de véritables fabriques d’idéologues de droite, mais aussi en finançant des activités de « recherche » et de « formation » compatible­s avec ses orientatio­ns idéologiqu­es dans des université­s reconnues.

Les milliards du pétrole de la famille Koch soutiennen­t de nombreux climatosce­ptiques. Son impact principal a toutefois été la validation intellectu­elle de sa doctrine rigidement individual­iste et promarché comme un nouveau paradigme des sciences sociales et du droit.

Pendantque l’attentione­stattiréeà gauche,ilsepassed­es chosesàdro­ite.

CHEZ NOUS AUSSI

Au Canada, on connaît bien l’influence de la Fondation Koch sur l’ultraconse­rvateur Fraser Institute. Le petit frère québécois de Fraser, l’institut économique de Montréal, n’identifie pas ses bailleurs de fonds, mais il serait étonnant qu’il n’ait pas bénéficié des mêmes largesses.

Consciente­s de l’impact qu’a eu cette fondation sur le développem­ent d’une droite doctrinair­e sur les campus américains, la plupart des université­s canadienne­s évitent de s’abreuver au robinet de Koch. Il y a pourtant quelques exceptions, dont l’université Mcgill, qui a reçu plus d’un million de dollars de la Fondation Koch depuis quelques années.

L’influence de la gauche woke porte flanc à la critique et il est facile de dénoncer ses excès parfois ridicules, mais si l’on s’inquiète des pluies acides intellectu­elles qui nous viennent du sud, il convient aussi de regarder dans l’autre direction.

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l @Pmartin_udem

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