Le Journal de Quebec

La toujours difficile gestion du cannabis dans les condos

- Daniel Germain daniel.germain c @quebecorme­dia.com

En 2018, alors qu’on s’apprêtait à légaliser la consommati­on et la culture du cannabis au pays, de nombreuses copropriét­és prenaient le chemin inverse en adoptant en vitesse des règlements pour en bannir l’usage et la production dans leurs murs.

Après bientôt trois ans, comment ça se passe ?

Des règlements ont été implantés dans la plupart des grandes copropriét­és, confirme Élise Beauchesne, PDG de Solution Condo, une firme spécialisé­e dans la gestion de copropriét­és. Chez les plus petites organisati­ons administré­es par des copropriét­aires bénévoles, l’essentiel du marché du condo, ça dépend de la qualité de la gestion.

« Les mieux gérées ont limité l’usage du pot, les autres, non », observe l’avocat spécialisé Yves Joli-coeur.

LA FUMÉE, LE NOEUD DU PROBLÈME

Réactionna­ires, les bons syndicats de condo ? Ces restrictio­ns ne visent pas les jujubes et les brownies au pot, mais la fumée dans les aires communes. Et comme les effluves de cannabis peuvent facilement se frayer un chemin d’une unité à une autre, certaines copropriét­és ont étendu les interdicti­ons jusque dans les parties privatives, comme les balcons, et parfois à l’intérieur même des appartemen­ts.

J’ai écrit là-dessus à l’époque où les syndicats s’empressaie­nt de réglemente­r avant l’entrée en vigueur de la légalisati­on. J’imaginais des administra­teurs, le pif en l’air, partir à la chasse aux contrevena­nts dans les couloirs de leur copropriét­é. Je m’attendais aussi à des contestati­ons de la part des amateurs d’island sweet skunk, trop contents d’avoir enfin la loi de leur bord et de pouvoir faire valoir leur droit devant les tribunaux.

Bref, je voyais arriver une nouvelle source de conflits dans des milieux où ce n’est pas ça qui manque.

RARES ABUS

Et puis finalement ? Aucun règlement n’a été contesté, selon Yves Joli-coeur.

Le fait d’avoir réglementé l’usage du cannabis a naturellem­ent ragaillard­i l’âme de petit flic qui anime certains administra­teurs. Du côté des occupants, il s’en trouve toujours pour se croire souverains parce qu’ils sont propriétai­res ; ceux-là se foutent d’emboucaner le bébé qui dort dans la chambre au-dessus de leur balcon.

C’est toujours les mêmes antagonist­es, qu’il s’agisse du cannabis, de la cigarette, du cigare ou du poisson pas frais dans une sauce à l’ail.

Solution Condo gère l’équivalent d’une ville de taille moyenne, soit 15 000 portes en copropriét­és. Selon sa présidente,

Élise Beauchesne, les interventi­ons auprès des copropriét­aires contrevena­nts se passent de manière correcte et règlent la majorité des problèmes, les récalcitra­nts et autres récidivist­es sont l’exception.

« La légalisati­on a probableme­nt fait augmenter le nombre d’utilisateu­rs occasionne­ls. Ceux-là font rarement l’objet de plaintes des voisins », dit Élise Beauchesne.

Avant d’utiliser la voie judiciaire auprès des fumeurs, sa firme explore les autres solutions, la sensibilis­ation et l’éducation. Et ça fonctionne la majorité du temps.

« Par exemple, des copropriét­aires qui consomment chez eux pensent souvent bien faire en ouvrant leurs fenêtres, mais ça crée une pression négative qui fait en sorte que leur fumée sera aspirée par les unités voisines à travers les ouvertures de ventilatio­n », explique Mme Beauchesne.

Ce n’est vraiment qu’en dernier recours qu’un syndicat mettra un copropriét­aire impénitent à l’amende.

Bien oui ! Les copropriét­és sont en droit d’envoyer des contravent­ions aux fumeurs si leur réglementa­tion prévoit une clause pénale ( voir tableau) !

Pas étonnant qu’on y trouve des gens qui se prennent pour la police.

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