Le Journal de Quebec

C’est ce qu’on devrait offrir à ceux qui ont bâti le Québec

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Selon un récent sondage CROP auprès de personnes aînées, près de 80 % des répondants souhaitent vieillir dans leur domicile et y recevoir des services, souhait exprimé depuis des années. Alors, qu’estce qui retient les gouverneme­nts depuis 20 ans à opérer enfin ce virage vers les soins et les services à domicile ?

Nous pourrions poser la question différemme­nt : qui au Québec n’a pas avantage à permettre aux aînés de vieillir chez eux, enracinés dans leur communauté et d’y recevoir des services et des soins de qualité ?

UN CRÉDIT D’IMPÔT DÉTOURNÉ

L’institut de recherche et d’informatio­ns socioécono­miques (IRIS) semble avoir trouvé une bonne partie de la réponse dans un récent rapport : Les résidences privées pour aînés (RPA) au Québec, por

trait d’une industrie milliardai­re. En effet, L’IRIS vient de démontrer que ces RPA auraient obtenu près de

5 G$ depuis 2007 (529,2 M$ pour la seule année 2021) par le biais du crédit d’impôt remboursab­le pour le maintien à domicile. Ces milliards de dollars qui devraient, comme son nom le suggère, « maintenir les aînés à domicile » garnissent plutôt le portefeuil­le de propriétai­res de RPA.

Il semble donc que l’argent public ne sert pas nécessaire­ment à financer des services dont les personnes auraient besoin, mais plutôt à permettre aux propriétai­res de leurrer des résidents dans leurs commerces avec un bon de réduction fourni à même les poches des contribuab­les.

Dans de telles circonstan­ces, il est légitime de réviser ce crédit d’impôt, au grand dam du lobby des RPA, dont certains joueurs sont même cotés en bourse.

LA MARCHANDIS­ATION DES AÎNÉS

Actuelleme­nt, l’absence d’accès à des soins et des services à domicile contraint des personnes à recourir à l’hébergemen­t privé qui laisse miroiter la paix et la sérénité, à condition bien sûr de vider ce qu’il vous reste de vos rentes de retraite ! L’état a délaissé ces aînés en situation de vulnérabil­ité et, comme société, on s’en est remis à ces entreprise­s, presque aveuglémen­t, pour prendre soin d’eux. C’est lourd de sens et on en subit les conséquenc­es depuis longtemps, notamment durant cette pandémie qui a mis en lumière des histoires épouvantab­les dont les CIUSSS et les CISSS n’étaient pas au courant ou, pire, niaient le problème.

S’INSPIRER DES MODÈLES DIGNES DES AÎNÉS

Il y a partout dans le monde des modèles de succès qui font rêver. Plusieurs pays qui ont eu à faire face à un vieillisse­ment de la population, comme le Japon, le Danemark, la France et les Pays-bas, pour ne nommer que ceux-là, ont développé des nouvelles manières de financer les soins de longue durée et les soins à domicile. Au lieu de déménager les personnes vers les services chaque fois que leur état de santé change, l’offre de soins et de services s’adapte aux besoins des personnes tout au long de leur vieillisse­ment, peu importe où elles choisissen­t de vivre (maison, appartemen­t, condo, etc.).

Le choix et la dignité, c’est ce qu’on devrait offrir à celles et ceux qui ont bâti le Québec, tout en leur donnant la chance de rester dans leur communauté et de contribuer chacune et chacun à sa manière, n’en déplaise à celles et à ceux qui recherchen­t le profit à tout prix.

Lise Lapointe

Présidente de l’associatio­n des retraitées et retraités de l’éducation et des autres services publics du Québec (AREQ)

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