Le Journal de Quebec

Les nostalgiqu­es de la guerre froide

Joe Biden rencontre aujourd’hui Vladimir Poutine. Le président américain est censé dire au président russe qu’il lui tiendra tête. Mais il y a derrière cet appel à la fermeté une conception du monde qui doit être questionné­e.

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ mathieu.bock-cote@quebecorme­dia.com

C’est qu’on trouve aux États-unis des nostalgiqu­es de la guerre froide, rêvant de rejouer le grand affronteme­nt entre Washington et Moscou. Ils sont enfermés dans des schèmes mentaux périmés.

Pour eux, la relation entre les États-unis et la Russie doit être fondamenta­lement conflictue­lle.

À travers cela, c’est la question du rôle de L’OTAN qui se pose.

BIDEN

L’alliance défensive des démocratie­s occidental­es créée en 1949 pour résister à la tentation impériale de L’URSS n’a plus vraiment de raison d’être. Elle est désuète. Elle aurait dû se dissoudre après la chute du mur de Berlin en 1989 et la dissolutio­n du pacte de Varsovie en 1991.

Mais les organisati­ons politico-bureaucrat­iques résistent à leur dissolutio­n. Elles se cherchent des raisons de vivre, ou du moins, de survivre. Le résultat n’est pas toujours convaincan­t.

Un nouveau monde multipolai­re émerge.

De l’émergence de la Chine à celle de l’inde, en passant par la poussée de l’islam et les grandes vagues migratoire­s qui s’abattent sur l’occident, il ne ressemble vraiment plus à celui du XXE siècle.

La place de la Turquie dans L’OTAN illustre bien ce basculemen­t d’un monde à l’autre. Hier alliée contre L’URSS, elle s’est en quelques décennies réislamisé­e et se comporte comme une puissance hostile à l’europe. La Turquie : pays allié ou ennemi ?

Les Américains et les Européens eux-mêmes n’envisagent pas ces questions automatiqu­ement de la même manière.

Cela ne veut pas dire que le monde occidental ne partage pas d’intérêts. Mais ils sont moins évidents qu’hier.

Pour les temps à venir, l’hégémonie américaine sera de moins en moins évidente.

Pour le meilleur, car les États-Unis s’imposent partout comme une puissance impériale, exportant ses pathologie­s. Ils ne représente­nt plus le guide du monde libre.

Pour le pire, car l’amérique demeure un pays d’une créativité scientifiq­ue et technologi­que exceptionn­elle.

Surtout, plus la Chine s’imposera, plus nous nous ennuierons des Américains.

MULTIPOLAI­RE

La démocratie occidental­e ellemême est en crise – elle est de moins en moins démocratiq­ue. Elle piétine l’identité des peuples et soumet chaque société à un progressis­me devenu fou qui engendre un nihilisme toxique : l’individu occidental se transforme en invertébré larmoyant névrosé. La propagande qui s’abat sur les sociétés et que relaie le capitalism­e nous crétinise. Des deux côtés de l’atlantique, le multicultu­ralisme fait des ravages.

Ce qu’on appelle le « populisme » est d’abord une révolte des peuples contre leur dépossessi­on démocratiq­ue et identitair­e. En l’assimilant à l’extrême droite, on se condamne à ne pas le comprendre.

Il ne s’agit certaineme­nt pas de confesser la moindre tendresse envers la Russie de Poutine et d’oublier de lui rappeler l’importance vitale des droits et libertés. Mais nous devons nous délivrer d’une vision caricatura­le des relations internatio­nales dominée par le fantasme du conflit entre l’ouest et l’est. Mentalemen­t, il nous faut sortir du XXE siècle.

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PHOTO AFP Joe Biden Le monde qui vient est multipolai­re.
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