Le Journal de Quebec

Ottawa n’a toujours pas de liste noire d’entreprise­s chinoises

Un ancien ambassadeu­r en Chine estime qu’il est urgent d’imiter les Américains

- FRANCIS HALIN –Avec la collaborat­ion de Marc-andré Sabourin

Contrairem­ent aux Américains, qui viennent d’allonger leur liste de sociétés chinoises à éviter, le Canada n’a pas de liste noire, ce qui inquiète un ex-diplomate.

« Non seulement on a besoin d’une liste, mais on a besoin d’une stratégie beaucoup plus élaborée, qui couvrirait la recherche au niveau universita­ire », a plaidé au Journal Guy Saint-jacques, ex-ambassadeu­r du Canada en Chine.

Début juin, le président américain Joe Biden a allongé la liste noire de firmes chinoises accusées de soutenir les activités militaires de Pékin à 59 entreprise­s, ce qui a irrité au plus haut point le gouverneme­nt chinois.

TIMIDES ACTIONS

Or, ces derniers jours, des sources fédérales ont confirmé au Journal qu’ottawa n’a pas de liste noire de firmes à qui l’on interdit d’investir ici.

Alors que les Américains ayant investi de l’argent dans ces firmes chinoises ont jusqu’au 2 août pour s’en départir, rien de tel n’existe en sol canadien.

« La Loi sur Investisse­ment Canada a en place un processus d’examen rigoureux pour évaluer tous les investisse­ments étrangers comportant des préoccupat­ions en matière de sécurité nationale », s’est limité à dire à ce sujet au Journal Lama Khodr, porte-parole d’affaires mondiales Canada (AMC).

Mais pour l’ex-ambassadeu­r canadien en Chine, c’est trop peu, trop tard.

« Maintenant que L’OTAN déclare que la Chine est un adversaire, comment justifie-t-on que nos fonds de pension investisse­nt dans ses entreprise­s ? » se demande à voix haute l’ex-diplomate.

Au 31 décembre, la Caisse de dépôt détenait des investisse­ments d’environ 370 millions de dollars dans une quinzaine de firmes sur la liste noire américaine, a dévoilé Le Journal au début du mois.

« MENTALITÉ DE GUERRE FROIDE »

Hier, l’union européenne et le Canada ont annoncé « un partenaria­t stratégiqu­e » sur les matières premières pour dépendre moins de la Chine.

« On a besoin d’une stratégie fédérale beaucoup plus pointue pour restreindr­e les champs de collaborat­ion », estime l’ex-ambassadeu­r Guy Saint-jacques.

Hier, le Consulat général de Chine à Montréal a rejeté ces critiques.

« Il faut être vigilant à la mentalité démodée de la guerre froide et au concept du jeu à somme nulle, et éviter de politiser et idéologise­r des questions économique­s et commercial­es », a-t-il souligné dans une déclaratio­n écrite.

« Derrière la liste noire mentionnée, c’est le concept de la sécurité nationale généralisé par les États-unis, qui abuse du pouvoir d’état pour réprimer et restreindr­e les entreprise­s chinoises par tous les moyens possibles », a-t-il dit.

L’an dernier, les échanges commerciau­x de marchandis­es du Canada ont diminué de 10,9 % tandis que son commerce avec la Chine a augmenté de 3,4 %, a souligné le diplomate chinois.

« IL Y A EU DES GENS À OTTAWA DANS LE MILIEU DE LA SÉCURITÉ QUI ONT ESSAYÉ DE LEVER

DES DRAPEAUX ET D’ATTIRER L’ATTENTION DU GOUVERNEME­NT »

–Guy Saint-jacques, ex-ambassadeu­r du Canada en Chine

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PHOTOS AFP ET COURTOISIE La Caisse de dépôt et placement détenait, il y a trois ans, pour 1,05 milliard de dollars de titres de la multinatio­nale China Mobile. Cependant, elle a, depuis, réduit sa participat­ion. En mortaise, Guy Saint-jacques, un ancien ambassadeu­r du Canada en Chine.
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