Le Journal de Quebec

Des mesures inefficace­s selon une ex-victime

- ELISA CLOUTIER

Une ancienne victime de violence conjugale et d’exploitati­on sexuelle critique sévèrement l’efficacité de l’article 810 du Code criminel, communémen­t appelé « interdit de contact », affirmant même qu’il s’agit d’un « cadeau » pour les agresseurs.

Interpellé­e par le 13e féminicide de l’année, qui a coûté la vie à la mère de famille Nathalie Piché, une ancienne victime de violence conjugale rappelle qu’il est « très difficile » de sortir d’une relation violente, empreinte de manipulati­on et de menaces.

« Il faut comprendre que les victimes, ce ne sont plus elles qui pensent, c’est l’agresseur qui pense pour elle », relate Émilie, qui souhaite conserver son anonymat en préservant son nom de famille.

Ayant elle-même retiré sa plainte contre son agresseur une première fois en raison du chantage et des menaces, elle affirme qu’il est difficile pour une victime d’aller au bout du processus judiciaire.

« Il me disait : “si tu m’aimais vraiment, tu n’aurais jamais appelé la police. Une bonne conjointe ne porte pas plainte contre son amoureux” », dit-elle.

Victime de violence conjugale pendant plus d’un an, elle a ensuite été forcée par son ancien conjoint à se prostituer pendant près de six mois, 7 jours sur 7. En 2012, il a écopé de 36 mois de prison.

Selon la femme de 29 ans de Québec, l’interdit de contact permet aux agresseurs d’isoler davantage leur victime de leurs proches. « C’est le cadre idéal pour lui [l’agresseur] pour éloigner de sa victime sa famille et ses amis, pour l’isoler encore plus, puisque la relation doit être secrète. Il ne faut pas que l’entourage le sache, sinon ils vont appeler la police ».

ISOLÉE ET VIOLENTÉE

« C’est à partir de ce moment que je n’avais plus de Facebook ni de cellulaire. Il m’avait même fait teindre les cheveux en roux », décrit l’ancienne victime, toujours aux prises avec les effets d’un choc post-traumatiqu­e, près de 9 ans après les évènements.

Selon elle, il est clair que « l’interdit de contact » n’est pas respecté, lorsque les femmes retirent leur plainte contre leur conjoint violent. « Ça devrait sonner une cloche au procureur, qui devrait lâcher un coup de fil à la police pour leur dire d’aller vérifier à l’adresse de l’agresseur ».

Selon une amie de Nathalie Piché, Noureddine Mimouni s’était en effet présenté chez la victime quelques heures à peine après son arrestatio­n l’hiver dernier, malgré sa condition de ne pas entrer en contact avec elle. « Elle avait pitié de lui, elle l’aimait », affirme Cindy H.

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PHOTOS STEVENS LEBLANC Plusieurs citoyens de l’arrondisse­ment de La Cité-limoilou, comme Gabrielle Gosselin et Daniel Guérard (mortaise), ont mentionné qu’il fallait demeurer vigilants dans le quartier, même en plein jour.

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