Le Journal de Quebec

Le Canada : un pays anglophone

- DENISE BOMBARDIER denise.bombardier @quebecorme­dia.com

Au Canada la réalité dépasse la fiction. Le statut officiel du français est une fiction. Car il n’y aura jamais d’égalité réelle entre les deux langues.

Pierre Elliott Trudeau le savait. Sa Loi sur les langues officielle­s a été un de ses coups politiques les plus fumants, car il a réussi à enfumer les Québécois francophon­es.

C’est aussi ce qu’il a fait quand il a mis son siège en jeu et ceux de ses députés contre promesse d’une réforme de la

Constituti­on canadienne lors de la campagne du référendum québécois en 1980. Le Québec a voté non, donc a cru le premier ministre Trudeau. René Lévesque, défait et humilié, refusera plus tard de signer la réforme constituti­onnelle.

Le 17 avril 1982, Pierre Elliott Trudeau, un sourire quasi ironique aux lèvres, regardera la reine Élisabeth II assise à ses côtés parapher le document du rapatrieme­nt de la Constituti­on canadienne sans l’accord du gouverneme­nt québécois.

En fait, P. E. Trudeau a gagné tous ses combats contre son ennemi juré René Lévesque.

Il faut rappeler ces réalités politiques pour comprendre que le multicultu­ralisme de Trudeau père assassinai­t en quelque sorte « le peuple fondateur francophon­e ». Son fils Justin n’est aucunement en rupture avec la pensée de son père. Son Canada post-national, cimenté dans les droits individuel­s, fait peu de place aux valeurs collective­s québécoise­s, dont la laïcité.

FRANCOS HORS QUÉBEC

Le dernier documentai­re auquel j’ai participé avec mon ami le réalisateu­r Paul Bourgeault sur les francos hors Québec en 2019 a été une expérience profession­nelle et personnell­e douloureus­e. Durant le tournage et à la suite de la diffusion à Radio-canada, j’ai été insultée et agressée par quelques élites francophon­es qui abhorrent le Québec.

Ces élites ne jurent que par le gouverneme­nt Trudeau dont elles dépendent financière­ment. Et ce n’est pas avec le projet de loi 32 sur l’égalité des langues, déposé hier, que les francophon­es hors Québec pourront obtenir, non pas en principe mais en fait, des services gouverneme­ntaux dans leur langue. Car les francos sont aussi en train de disparaîtr­e.

N’oublions pas que les Canadiens nous ont aimés bruyamment en 1995 lorsqu’ils ont débarqué en masse à Montréal avant le référendum du gouverneme­nt de Parizeau.

N’oublions pas non plus que pendant la prochaine campagne électorale les Canadiens de tous les partis vont recommence­r leurs mamours en contrepart­ie de nos voix.

Français, anglais, entre les deux le coeur balance.

RÉALISTE

J’ai vécu dans le monde politique toute ma vie, mais en pratiquant une distance critique jusqu’à ma conversion en chroniqueu­se. Les années aidant, ayant observé au plus près les contradict­ions et les fourberies humaines, je me permets de jeter ce regard non pas pessimiste mais terribleme­nt réaliste.

Les Québécois n’ont d’avenir que celui qu’ils choisissen­t eux-mêmes. Il existe chez eux une caractéris­tique de leurs ancêtres normands quand ils répondent « P’têt ben qu’oui, p’têt ben qu’non ! ». La CAQ de François Legault réunit des gens courageux, lucides, mais aussi inquiets. Certains sont même dans le déni.

Notre avenir en tant que Québécois francophon­es rétrécit d’année en année. Souvenons-nous que le Québec est la seule minorité au Canada à qui l’on nie son statut de minoritair­e. Pire, l’on nous taxe désormais de colonialis­tes blancs. Quelle désolation !

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