Aucune candidature reçue
Des offres d’emploi restent sans réponse malgré les immenses efforts des patrons
« ÇA FAIT UN MOIS QUE L’ON A PUBLIÉ L’OFFRE D’EMPLOI, ET ON N’A REÇU AUCUN CV »
– Yannick Ruel, directeur d’usine
Pas de CV, pas d’étudiants, pas de travailleurs étrangers... nos patrons d’entreprise ne savent plus où donner de la tête pour pourvoir les 180 000 postes toujours vacants au Québec.
« On ne sait plus quoi faire pour recruter », résume Yannick Ruel, directeur d’usine chez Termic, un fabricant québécois de conduits de ventilation d’une trentaine d’employés de Plessisville fondé en 1995.
Opérateurs de conduits spiralés, journaliers… La PME de la MRC de l’érable a beau offrir entre 15 $ et 20 $ l’heure, rien n’y fait. Un mois après avoir publié une offre d’emploi, personne n’a même encore envoyé son CV.
TRÈS NOMBREUX AVANTAGES
« On offre un mois de vacances, quatre jours de maladie payés, le travail à l’air climatisé ou à la chaleur l’hiver et un REER collectif, mais on ne sait plus quoi faire pour attirer le monde », énumère Yannick Ruel.
« On a trois travailleurs étrangers temporaires à 15 $-20 $ l’heure. On a le max. Si on pouvait en avoir six ou sept, ça serait intéressant », dit-il.
POINTE DE L’ICEBERG
Quelque 181 030 postes étaient vacants à la grandeur du Québec à la fin du premier trimestre et 5,1 % de tous les emplois disponibles étaient vacants, selon Statistique Canada, un record au pays.
« Il y a urgence pour que le gouvernement agisse pour aider les PME freinées par la pénurie de main-d’oeuvre », insiste François Vincent, de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI).
« C’est du jamais-vu ! En plus, conjugué aux défis d’approvisionnement, c’est complètement fou », va jusqu’à dire Nathalie Rochefort, directrice générale de la Chambre de commerce et d’industrie du Coeur-du-québec.
Pour David Lampron, associé de L’équipe Humania, en RH, les travailleurs ont le gros bout du bâton.
« On va peut-être recommencer à retrouver un équilibre dans deux ou trois ans, mais pas avant », prévient-il.
ÉCRASÉE PAR LA PCU
À Gatineau, c’est la Prestation canadienne d’urgence (PCU) qui vient de mettre fin au rêve de Christine Désormeaux, qui n’a pas eu le choix de vendre son dépanneur, faute d’employés.
« Mon mari est tombé malade. J’ai dû embaucher des employés, mais quand la PCU est arrivée, mes cinq étudiants ont lâché », confie l’ex-propriétaire du Dépanneur 315.
« De mars 2020 à janvier 2021, je n’ai pas eu une journée de congé. J’ai travaillé sept jours par semaine. J’ai vendu le chalet, j’ai vendu mon dépanneur », partage-t-elle.
Au bout du fil, elle raconte que des cousines, qui ont aussi des dépanneurs, feront bientôt comme elle.
« Dans les régions, c’est difficile. Il y a toutes sortes d’enjeux qui vont au-delà du simple emploi, l’intégration dans la région, les services, les familles, etc. », conclut Sébastien Arcand, professeur et directeur du département de management de HEC Montréal.
Près de 60 % des entrepreneurs sont d’avis que Québec doit en faire plus pour attirer les immigrants en région afin d’atténuer la pénurie, selon un sondage de la FCEI.