La musique « tricotée » ici
Tout d’abord, il va sans dire que les goûts et les préférences sont des choses nécessitant une découverte ou du moins un essai. En partant de cette généralité, il est donc possible de l’appliquer à la réalité musicale du Québec. Pour aimer une chanson ou bien une composition, il faut d’abord la découvrir, l’entendre. Cela peut se produire par plusieurs moyens dont le bouche-à-oreille, l’écoute d’une émission télévisuelle musicale, la radio ou bien les plateformes de musique en continu. Parmi cet échantillon des moyens de découvrir différentes musiques se trouvent deux vecteurs fort importants : celui de la radio et des plateformes de musique en continu. Bref, ce sont les endroits où la consommation musicale est majoritairement mise de l’avant. Une diffusion adéquate de la musique québécoise sur ces deux médiums participerait à l’essor de l’industrie de la musique au Québec. Sans oublier que l’écoute de notre musique, produite par des gens de chez nous, enrichit fortement la culture québécoise étant donné la proximité, notamment, par l’entremise des paroles véhiculant notre réalité.
Le paysage numérique qui s’impose
Dans un même ordre d’idées, assurer la vitalité des genres musicaux présents au Québec nécessite une exposition. Il faut alors exposer cette musique aux endroits où se dirige l’écoute des consommateurs/ mélomanes. Les temps changent et les tendances aussi du même coup. Les auditoires se fragmentent et de nouvelles plateformes d’écoute de musique s’imposent. Le numérique devient alors la zone de prédilection pour plusieurs consommateurs de musique. Ces plateformes octroient davantage de pouvoir aux consommateurs et c’est là que vient se différencier cette offre d’écoute musicale en quelque sorte. Cependant, ces changements de comportements viennent aussi avec des conséquences sur la consommation de la musique d’ici. De surcroît, les radiodiffuseurs francophones ont un quota de musique francophone à faire passer sur leurs ondes et avec raison…pour permettre la vitalité de cette industrie et surtout permettre sa découverte (ainsi vient la pérennité). Est-il de même pour les plateformes numériques de musique en continu ? Pas tout à fait, la musique francophone représente seulement 2,7 % des 10 000 chansons les plus populaires. Serait-il possible de demander des obligations à ce type de plateformes ? Du moins, « personnaliser » l’algorithme de suggestions de ces plateformes afin d’améliorer la découverte de notre musique ne devrait pas être une idée à balayer du revers de la main.
Notre musique : un lien intangible qui nous unit
À vrai dire, il vient aussi un argument allant au-delà de la langue et nécessite d’embrasser la globalité culturelle du paysage socioculturel québécois. Effectivement, il semble que la musique permet un prolongement de notre identité culturelle collective, un peu comme une co-création entre l’artiste et son public. La chanson populaire se crée alors par le biais de notre réalité et vient ensuite illustrer une image poétique par sa musique et ses paroles. C’est grâce à cet amalgame que les gens se reconnaissent. Comme le disait Gilles Vigneault : « Nous faisons une catharsis [...] Pour permettre aux gens de s’exprimer à travers nous. Nous sommes l’éponge qui recueille leur eau. Nous distillons les mots qu’ils nous donnent et leur rendons, autant que possible en produit fini, en l’occurrence en chansons.. » (Gagné, 1974, p. 25). De ce fait, la relation de proximité entre les artistes d’ici, avec leur musique et leurs paroles offre une expérience des plus riches culturellement et peut-être même humainement grâce aux références communes. Ainsi, la musique devient ce à quoi nous ressemblons, être curieux des divers genres et des divers usages linguistiques nous dévoile une magnifique pluralité : celle de notre diversité. Enfin, cette curiosité peut facilement devenir l’objet d’une métaphore puisque c’est par celle-ci que se brisent l’ignorance et les idées préconçues. Écouter les artistes d’ici, c’est de nous écouter, mais surtout de nous reconnaître entièrement.
L’achat local (et la musique aussi...)
Pour conclure, la musique d’ici se doit d’être exposée pour lui laisser la chance d’être découverte et d’être appréciée à sa juste valeur. Une telle exposition devrait alors renforcir l’industrie de la musique au Québec, mais aussi solidifier l e l ien d e p roximité e ntre l es a rtistes e t la population québécoise. Garder notre musique en santé, c’est aussi préserver les diverses facettes de ce que nous sommes et les divers témoignages de notre identité. Par ailleurs, ce discours peut aussi s’apparenter au discours de l’achat local. En effet, aimer la musique d’ici, c’est aussi synonyme de bien vouloir la consommer pour que nos artistes obtiennent leur part des redevances. Évidemment, plus il y a d’intermédiaires dans la diffusion de leur musique plus leur redevance diminue. Alors, si vous écoutez beaucoup de musique sur les plateformes numériques n’hésitez surtout pas à mettre le Québec dans votre onglet de recherche. N’attendez pas que les algorithmes vous le suggèrent; allez au-devant de ceux-ci. Il faut cependant rappeler que les artistes touchent peu de revenus de cette écoute et qu’acheter un album contribue davantage à supporter nos artistes. Une fois que cette pandémie se calmera assez pour assister plus facilement à des concerts, pourquoi ne pas aller festoyer près d’une scène où performeront un ou plusieurs artistes d’ici ? Par conséquent, l’effort de solidarité peut aussi être élargi à l’industrie musicale étant donné qu’elle fait vivre, à elle aussi, plusieurs Québécoises et Québécois. Cette période a été très difficile pour plusieurs secteurs économiques et particulièrement pour cette industrie. Heureusement, l’art éponge les blessures pour en créer des chefs-d’oeuvre. Il va sans dire que les maux d’hier deviendront de magnifiques chansons d’aujourd’hui et de demain pour qu’ensemble nous puissions vivre notre catharsis au rythme de la merveilleuse musique d’ici.
Sources
https://www.ledevoir.com/culture/musique/576553/pour-plus-de-musique-bleue Alarie, P. (2008). Chanson et identité: étude de la chanson émergente au Québec. Mémoire de maîtrise). Université du Québec à Montréal. Récupéré de https://archipel. uqam.ca/760/1/m10157.pdf?gathstaticon=true
Gagné, M. (1974). Propos de Gilles Vigneault. Montréal : Nouvelles éditions de l’arc. https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1782560/denonciation-musique-radios-achatlocal-artistes-diffusion https://www.lapresse.ca/affaires/medias/2021-03-30/musique-francophone/lesradios-suggerent-de-retarder-la-baisse-des-quotas.php#:~:text=ainsi%2c%20les%20 quotas%20de%20musique,les%20heures%20de%20grande%20%c3%a9coute. https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/des-matins-en-or/segments/ entrevue/209902/steve-jolin-7-ieme-ciel-anodajay-francais https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1781556/adisq-mesures-musique-francophoneradios-commerciales