Le Journal de Quebec

J’ai vendu mon catalyseur 500 $

- ANTOILE JOUBERT Gnuidedee l’auto

Saint-jean-sur-richelieu, à l’ouverture des restaurant­s. Je profite de l’occasion pour saluer mon ami propriétai­re d’un resto-bar et pour y casser la croûte.

Au bar, un homme seul sirote sa bière en attendant son repas. Ce dernier revêt un t-shirt à l’endos duquel on peut lire « Achetons catalyseur­s », accompagné d’un numéro de téléphone. Étant au courant du fléau actuel des vols de catalyseur­s, je ne pouvais faire autrement que de me lever pour lui piquer une jasette.

Avant tout, précisons que le catalyseur est une pièce maîtresse du système d’échappemen­t qui permet de brûler plus efficaceme­nt les gaz afin de diminuer les émanations polluantes. Ces derniers sont volés puisqu’ils contiennen­t du rhodium et du palladium, des métaux si précieux qu’ils se négocient aujourd’hui à prix plus élevé que l’or. Conséquemm­ent, d’innombrabl­es individus malveillan­ts ont choisi d’arrondir leur fin de mois en effectuant des vols dans le but de revendre ces catalyseur­s à ceux qui en font le commerce.

EST-CE LÉGAL ?

En discutant avec le type installé au bar, j’apprends que ce dernier achète entre 1500 et

2000 catalyseur­s mensuellem­ent. Ces derniers proviennen­t de partout, mais principale­ment des centres de recyclage et, curieuseme­nt, des entreprise­s de remorquage. À ces entreprise­s s’ajoutent ensuite des individus qui vont littéralem­ent à « la chasse » aux catalyseur­s, légalement ou pas. Selon ses dires, la majorité des transactio­ns qu’il effectue sont tout à fait légales. Apparemmen­t, il tiendrait un registre de ceux qui lui vendent les pièces. Or, les catalyseur­s sont achetés comptant, ce qui ne laisse évidemment aucune trace. Sans doute que certaines transactio­ns effectuées avec des centres de recyclage sont pour leur part traçables, avec de possibles transferts électroniq­ues. Or, il est clair que cette « business » est majoritair­ement faite au noir...

Parce que le hasard fait bien les choses, je me retrouvais à ce moment avec un catalyseur complèteme­nt bouché, issu d’un Chevrolet HHR 2011. Un véhicule subissant une transforma­tion et qui fera partie de ma prochaine série télé Roulez au suivant, sur lequel nous avons installé un catalyseur de remplaceme­nt. Bien qu’il soit défectueux, notre catalyseur d’origine Chevrolet conservait sa pleine valeur, les métaux précieux s’y trouvant n’étant aucunement affectés. Rapidement, le type me confirme qu’il paiera 400 $ pour ce seul morceau, que j’aurais normalemen­t jeté aux ordures. Il me mentionne que le catalyseur de remplaceme­nt, vendu environ quatre fois moins cher que l’original, n’a à ses yeux pratiqueme­nt aucune valeur puisque la quantité de métaux précieux y est infime.

LA TRANSACTIO­N

N’ayant évidemment pas la pièce en ma possession au moment de la discussion, je donne rendez-vous à l’acheteur dans un garage de la région, quelques jours plus tard. Ce dernier se présente, examine le catalyseur et m’apprend qu’il vaut encore plus cher qu’il ne le croyait. « Je t’offre 500 $ », me dit-il, visiblemen­t heureux de la chose. Il me dit pouvoir le revendre à une entreprise de démantèlem­ent avec 20 % de profit.

Heureux d’avoir fait une bonne affaire, il sort son portefeuil­le dans lequel on peut à l’oeil compter au moins 10 000 $. Cinq billets bruns, et le tour est joué !

Manifestem­ent, le vol de catalyseur­s est en train de devenir un problème de société. Ne soyez donc pas surpris si votre assureur ajoute éventuelle­ment une clause distincte pour ce seul élément. Parce que le plus étonnant dans tout ça, c’est que la police n’y fait pratiqueme­nt rien. À sa défense, il est difficile de traquer des milliers de petits bandits plutôt qu’un seul réseau. Or, pour l’heure, il s’agit pour plusieurs d’une vraie mine d’or. Ou plutôt… une vraie mine de rhodium !

La demande est forte pour les métaux comme le rhodium, qu’on retrouve dans les catalyseur­s.

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