Le Journal de Quebec

Il a été échappé par le système

Le tueur allégué souffrait d’un lourd trouble obsessionn­el compulsif

- ROXANE TRUDEL

L’homme accusé d’avoir tué son ex-copine en la poignardan­t devant des passants, mardi, à Montréal, n’a jamais pu obtenir les soins adéquats en santé mentale dont il aurait eu besoin dès son plus jeune âge, déplore une proche parente.

« L’accompagne­ment en santé mentale est déficient. Ça n’a pas de bon sens de les laisser à euxmêmes. Aujourd’hui, c’est mon cousin, demain ça va être qui ? On va encore se dire “on aurait donc dû” », souffle Sonia Pelletier, cousine de François Pelletier.

Attablée à un café, la femme de 41 ans a accepté de rencontrer Le Journal hier pour dénoncer les lourds manques en santé mentale, qu’elle constate au quotidien à titre de directrice générale dans un centre de traitement en dépendance.

Mardi, son cousin François Pelletier, 36 ans, aurait assassiné Romane Bonnier en plein jour sur Le Plateau-mont-royal. Selon des témoins, celui-ci s’excusait tout en poursuivan­t son geste rageur sur la jeune femme de 24 ans.

« J’ai besoin de faire ça. Ça n’avait pas besoin de se finir comme ça. Je suis désolé. Je suis désolé », auraitil répété.

IMPENSABLE

Les larmes lui montent aux yeux quand elle repense à l’horreur commise par celui qu’elle considère comme un frère.

« C’est impensable qu’il ait pu faire ça. Il n’a jamais commis de gestes de violence de sa vie, avant. Il n’a jamais eu de dépendance. Il était hyper social, instruit. Je suis tellement désolée pour la victime et sa famille. La santé mentale n’excuse en rien le geste », souligne-t-elle. Mais ce qui est d’autant plus déplorable, poursuit-elle, c’est que les gens qui souffrent de troubles mentaux ne soient pas bien encadrés.

Elle raconte qu’à l’âge de 3 ans, François Pelletier a dû lui-même composer le 911 pour sa grandmère, morte d’une attaque cardiaque devant ses yeux.

Dès lors, il a commencé à développer un lourd trouble obsessionn­el compulsif, accompagné de périodes de paranoïa et de pensées obsédantes.

À certains moments, il ouvrait les poignées de porte avec ses poignets ou arrêtait de manger complèteme­nt par crainte d’être contaminé. Il craignait aussi d’être suivi et écouté.

Il changeait constammen­t de téléphone ou d’appartemen­t pour ces raisons. Sa cousine l’a hébergé à quelques reprises. Pourtant, ça a tout pris pour que le médecin de famille de Mme Pelletier accepte de le rencontrer. Et puisque le trentenair­e ne se présentait pas aux rendez-vous, « ça s’est arrêté là », dit-elle. Il aurait aussi consulté un autre médecin à Montréal.

AUCUNE STABILITÉ

« Il n’avait plus aucune stabilité dans sa vie. [...] Sa médication, il ne l’a pas toujours prise de façon constante, parce qu’il pensait que dès qu’il ouvrait le pot, les médicament­s se contaminai­ent », illustret-elle. À un certain point, elle l’a forcé à passer des tests dans un centre hospitalie­r, qu’il a ensuite pu quitter de son propre chef.

« Ils l’ont laissé partir, soupire-telle. Il aurait dû être pris en charge. Ça prend des suivis constants en santé mentale. Les hôpitaux débordent. Ils nous poussent [les patients désorganis­és] dans les bras, même s’ils ne sont pas aptes. »

Elle espère de tout coeur que la famille de la victime aura l’accompagne­ment nécessaire à la suite du drame.

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1. Des policiers étudiaient mardi la scène de crime. 2. Le lendemain, plusieurs sont venus porter des fleurs sur les lieux en mémoire de la victime. 3. Romane Bonnier, la femme de 24 ans tuée sauvagemen­t. 4. L’accusé François Pelletier, 36 ans, avec en mortaise une image de son arrestatio­n.
PHOTOS AGENCE QMI, THIERRY LAFORCE ET MAXIME DELAND, INSTAGRAM, FACEBOOK ET COURTOISIE. 2 1. Des policiers étudiaient mardi la scène de crime. 2. Le lendemain, plusieurs sont venus porter des fleurs sur les lieux en mémoire de la victime. 3. Romane Bonnier, la femme de 24 ans tuée sauvagemen­t. 4. L’accusé François Pelletier, 36 ans, avec en mortaise une image de son arrestatio­n.
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