Le Journal de Quebec

Un objectif controvers­é

La fin de la vente de véhicules à essence au Québec en 2035 ne fait pas l’unanimité

- VINCENT LARIN

La décision de Québec d’interdire la vente de véhicules à essence neufs en 2035 divise. D’un côté, les constructe­urs et les concession­naires plaident qu’il s’agit d’une échéance déjà très serrée et craignent des pénuries de véhicules. De l’autre, des groupes environnem­entaux soutiennen­t qu’il faut le faire cinq ans plus tôt pour le bien de la planète.

Tous ne s’entendent pas sur l’échéancier, mais ils pressent Québec de mettre en place dès maintenant des mesures afin d’adoucir la transition vers les véhicules électrique­s ou hybrides (voir boîtes infos). C’est qu’avec à peine plus de 117 549 véhicules électrique­s sur les quelque 6,1 millions qui circulent sur les routes de la province, la marche est haute.

Chez les Constructe­urs mondiaux d’automobile­s du Canada, une associatio­n qui représente Hyundai, Honda, Kia, Nissan, Toyota et Mazda, notamment, on fait valoir qu’il s’agit d’un échéancier « déjà très ambitieux ».

« Les constructe­urs automobile­s font face à des défis l’approvisio­nnement pour les matériaux critiques pour la production des véhicules sans émissions », indique leur porte-parole, Andrew Mckinnon.

Il ajoute que même si, selon plusieurs rapports, le prix des véhicules électrique­s sera comparable à celui des véhicules à essence quelque part entre 2025 et 2035, cela dépendra de l’approvisio­nnement de ces pièces. Si elles sont difficiles à se procurer, leur coût de production pourrait grimper en flèche.

« TOTALEMENT FAUX »

Or, selon l’associatio­n des véhicules électrique­s du Québec (AVEQ), il est « totalement faux » d’affirmer qu’une pénurie plane à l’horizon.

« C’est seulement parce qu’on essaie de préserver une industrie, un peu comme lorsque Kodak essayait de préserver le film en disant que les appareils photo digitaux ne fonctionne­raient pas », ironise le directeur de l’organisme, Simon-pierre Rioux.

Il donne en exemple la Norvège où d’ici la fin de l’année, 90 % des véhicules neufs vendus dans le pays seront électrique­s. Malgré une pénurie de puces électroniq­ues à l’échelle mondiale, la vente de véhicules électrique­s continue d’augmenter, fait-il aussi valoir.

L’échéance de 2035 fixée par le gouverneme­nt permet toutefois de « calmer le jeu », concède M. Rioux en ajoutant être persuadé qu’elle sera éventuelle­ment devancée lorsqu’on sera rassuré sur la capacité des producteur­s à fournir assez de véhicules.

INVESTISSE­MENTS IMPORTANTS

Des investisse­ments importants devront être faits dans le secteur privé, notamment chez les concession­naires, qui auront à travailler avec ces nouveaux véhicules plus complexes à réparer et à entretenir.

« Le petit garage, à Matane, bien il est obligé lui aussi d’avoir tout cet équipement, même s’il n’en vend pas beaucoup de véhicules électrique­s », s’exclame le PDG de la Corporatio­n des concession­naires automobile­s du Québec, Robert Poëti.

« CONDITIONS IDÉALES »

Mais si l’annonce de l’interdicti­on de la vente de véhicules à essence « envoie un message très très fort à l’industrie », la fixer en 2035 plutôt qu’en 2030 « repousse l’électrific­ation à son tour », estime l’analyste en mobilité d’équiterre, Andréanne Brazeau.

« On a les conditions idéales ici pour le faire et ce n’est pas comme si on partait de très très loin, nous sommes déjà des leaders dans le domaine », ajoute-t-elle.

Qui plus est, le groupe de travail sur l’électrific­ation formé par le gouverneme­nt en vue de l’élaboratio­n de son Plan pour une économie verte (PEV) avait recommandé la date de 2030, rappelle Andréanne Brazeau.

 ?? PHOTO D’ARCHIVES, DIANE TREMBLAT ?? Jonatan Julien, ministre de l’énergie et des Ressources naturelles du Québec, François-philippe Champagne, ministre de l’innovation, des Sciences et de l’industrie du Canada, et Robert Poëti, président-directeur général de la Corporatio­n des concession­naires automobile­s du Québec, lors du lancement du Salon du véhicule électrique de Québec, au Centre de foires, au début d’octobre.
PHOTO D’ARCHIVES, DIANE TREMBLAT Jonatan Julien, ministre de l’énergie et des Ressources naturelles du Québec, François-philippe Champagne, ministre de l’innovation, des Sciences et de l’industrie du Canada, et Robert Poëti, président-directeur général de la Corporatio­n des concession­naires automobile­s du Québec, lors du lancement du Salon du véhicule électrique de Québec, au Centre de foires, au début d’octobre.

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