« IL Y A DES ANNIVERSAIRES QU’ON VEUT GARDER… D’AUTRES PAS
La date du 8 mai n’est pas encerclée dans le calendrier de Jacques Villeneuve
Jacques Villeneuve s’attend à recevoir beaucoup d’appels et de témoignages demain pour marquer le 40e anniversaire de l’accident tragique de son père, au circuit de Zolder, à la veille de la présentation du Grand Prix de Formule 1 de Belgique en 1982.
« Je ne retiens pas la date du 8 mai et elle ne me traverse pas l’esprit, a-til expliqué en entrevue au Journal. Honnêtement, je n’y pense jamais. »
« Il y a des anniversaires qu’on veut garder, d’autres pas, poursuit-il. Nous sommes très doués, en tant qu’êtres humains, pour oublier les choses dont on ne veut pas se rappeler. Et après, c’est comme une surprise. C’est ma façon de penser et ça fonctionne bien. »
N’empêche que Villeneuve a baptisé le tout dernier de la famille au prénom de son père célèbre.
« Ce n’était pas quelque chose de léger, affirme-t-il. Je n’étais pas prêt à le faire et pas à l’aise avec ça avant. Par contre, j’avais franchi une étape avec mon quatrième enfant, Henri, qui était le deuxième prénom de mon père. Pour moi, c’était le bon moment. J’avais probablement des choses à comprendre et à digérer. »
Gilles a vu le jour le 26 janvier dernier. Les autres rejetons de Jacques, qui ont pour prénom Jules, Joakim, Benjamin et Henri, sont nés de deux unions précédentes. Le champion du monde de F1 en 1997 partage sa vie avec sa nouvelle conjointe et mère de son cinquième garçon, Giulia Marra.
UNE LÉGENDE POUR TOUJOURS
Villeneuve a beaucoup hésité à parler de son père dans le passé. Il paraît plus ouvert aujourd’hui quoiqu’il souhaiterait encore éviter le sujet.
« Je me souviens qu’à ma première victoire en série CART [ex-indycar] en 1994, un journaliste m’avait mis un micro dans la bouche à ma sortie de voiture et la question qu’il m’a posée faisait allusion à mon père. Je lui ai répondu que ma première pensée n’était pas pour Gilles, mais qu’elle allait plutôt à l’équipe qui m’a fait gagner. »
« J’ai maintes et maintes fois rejeté les questions qui concernaient Gilles, dit-il. Je ne voulais pas marcher dans l’ombre de mon père. Il restera une légende pour toujours. Par contre, je n’ai jamais tenté de faire mieux que lui, ni même de l’imiter, comme beaucoup de gens voulaient, et veulent encore, me faire dire », explique-t-il.
« Ces gens ont souhaité que je sois un deuxième Gilles. Je m’en fous complètement. Ça n’a jamais été mon but. Moi, j’ai voulu vivre ma vie. »
TRÈS PEU DE SOUVENIRS
« Mais, n’en doutez point, je suis fier d’être son fils. Il est mon héros. Ce n’est que plus tard que j’ai réalisé comment il était populaire et adulé. Pour bien du monde, Gilles est encore vivant », poursuit-il.
Jacques n’avait que 11 ans quand l’embardée fatale est survenue au circuit de Zolder, en Belgique, le 8 mai 1982.
« J’ai très peu de souvenirs de Gilles en tant que père, avoue-t-il. Son décès sur le coup ne m’a pas réellement choqué. Puis, ça faisait deux ou trois ans que ma soeur [Mélanie] et moi n’étions plus habitués de le voir. Il était occupé à courir, à faire des essais chez Ferrari et à s’adonner à des hobbies. »
Or, ces passe-temps étaient de s’évader – pour ne pas dire d’effectuer des acrobaties – à bord de son hélicoptère, de naviguer à haute vitesse sur son bateau ou de défier les sentiers accidentés au volant de son véhicule tout-terrain.
« Les quelques moments que je me rappelle avec lui, indique Villeneuve, c’était quand il faisait des manoeuvres plutôt folles où on aurait pu mourir. Il avait cette passion et cette volonté d’exploiter le maximum des possibilités, non sans risque.
« Il s’amusait souvent à pousser les limites de sa voiture, à essayer même de la détruire. »