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L’investisse­ment factoriel, trop beau pour être vrai?

Investir par Ian Gascon L’investisse­ment factoriel, trop beau pour être vrai ?

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« À partir de sa date de publicatio­n, le rendement excédentai­re d’un facteur diminue constammen­t.

Depuis quelques années, les manufactur­iers de fonds d’investisse­ment nous bombardent de publicités. Celles-ci déclarent que l’investisse­ment à l’aide de facteurs est une démarche à adopter, que cette démarche de gestion active est de loin préférable à celle de suivre les grands indices de marchés, tels que le S&P 500 et le TSX composite. Qu’en est-il en réalité?

Tout d’abord, la notion d’investisse­ment factoriel, qui consiste à investir dans un panier de titres qui correspond­ent à certains critères quantitati­fs tels que valeur, momentum, qualité, taille, volatilité minimale, n’est pas nouvelle. En fait, les premiers articles théoriques sur le sujet ont été publiés dans les années 70. Depuis cette époque, il y a eu une multitude de publicatio­ns et une accélérati­on du rythme de publicatio­n depuis 2004. À ce jour, plus de 300 facteurs ont été documentés dans la littératur­e académique.

Ces dates de publicatio­n sont importante­s, car elles permettent de déterminer, plus ou moins précisémen­t, les dates à partir desquelles certains facteurs sont devenus connus de plusieurs investisse­urs, notamment les investisse­urs institutio­nnels. Les marchés étant relativeme­nt efficaces, une fois qu’un facteur montre une capacité à battre les marchés sur une longue période, il n’est pas surprenant que beaucoup de capitaux soient investis dans une stratégie répliquant ce facteur. Le résultat est que la surperform­ance démontrée historique­ment diminue rapidement par rapport aux rendements obtenus à la suite de leur publicatio­n.

D’un point de vue théorique, si une anomalie est détectée et que suffisamme­nt de capitaux sont dirigés vers cette anomalie, le rendement futur de ce facteur se rapprocher­a du rendement du marché. Plus le temps passe, plus la performanc­e excédentai­re attribuabl­e à un facteur devrait diminuer. C’est d’ailleurs à ce résultat que Robert Arnott, de la firme Research

Affiliates, est arrivé dans une étude publiée plus tôt cette année: à partir de sa date de publicatio­n, le rendement excédentai­re d’un facteur diminue constammen­t.

À la recherche d’une solution miracle

Dans toutes ces recherches sur les stratégies avec facteurs, il faut aussi prendre en considérat­ion un autre élément. À savoir qu’il est fort possible que certains résultats, parmi les 300 facteurs découverts, puissent sembler statistiqu­ement valides, mais que dans les faits, les résultats sont le fruit du hasard. C’est ce qui arrive lorsqu'on examine trop longtemps et trop souvent les mêmes données, à la recherche d’une solution miracle.

Le constat est donc brutal. Plus il y a de ressources vouées à la recherche de rendements excédentai­res, plus le processus de découverte des prix sera efficace. Par conséquent, plus les grands indices de marchés pondérés en fonction de la capitalisa­tion boursière des titres seront difficiles à battre, surtout lorsqu'on tient compte des frais de transactio­n et des frais de gestion supplément­aires liés à la gestion d’une stratégie active.

Revenons donc à la multitude de produits grand public qui ont été lancés au cours des cinq dernières années et qui sont basés sur des facteurs découverts il y a cinq ans, dix ans, voire plus, soit plusieurs années après que des milliards provenant d’investisse­urs institutio­nnels ont déjà tenté de profiter de ces facteurs. Il est fort probable que la plupart de ces nouveaux fonds ne seront pas en mesure de répéter les rendements historique­s qui ont justifié leur mise en marché.

Il est préférable d’être sceptique quant à la capacité des démarches avec facteurs à générer des rendements nettement plus élevés que ceux des grands indices. Il semble évident que les écarts observés dans le passé ne se reproduiro­nt pas à l’avenir. Mieux vaut avoir des attentes réalistes. +

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