Les Affaires

Intelligen­ce artificiel­le

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- Julien Brault julien.brault@tc.tc pdg de Refuga

Les nomades numériques réinventen­t le voyage d’affaires

— Les technologi­es ont donné la possibilit­é au bureau d’envahir les vacances de nombreux travailleu­rs jusque sur la plage. Toutefois, les mêmes technologi­es permettent aujourd’hui aux nomades numériques, des travailleu­rs autonomes et des entreprene­urs hautement mobiles, de redéfinir le voyage d’affaires.

Surfant sur la vague, de nombreux établissem­ents fondés pour servir cette clientèle émergent. Startup Basecamp, qui ouvrira un premier établissem­ent à Montréal en juillet, s’inscrit dans la foulée.

« Il y a un aspect génération­nel à cette tendance d’aller à l’étranger pour lancer une entreprise, déclare Vincent Lachance, cofondateu­r de Startup Basecamp Montréal. L’idée est que, si on a 10 000$ pour lancer une entreprise, on peut se rendre plus loin avec ce montant, à Bali [plutôt] qu’en Californie, tout en allant chercher une qualité de vie intéressan­te. »

Si Montréal n’est pas tout à fait Bali, Vincent Lachance fait le pari qu’il y aura assez de nomades numériques qui transitero­nt par Montréal pour justifier l’ouverture d’une maison de chambres nouveau genre sur le Plateau-Mont-Royal. Notamment, il vise à convaincre les entreprene­urs qui viennent à Montréal pour se joindre à un accélérate­ur comme FounderFue­l d’y louer une chambre.

Fondée en Californie, Startup Basecamp est à mi-chemin entre un gîte touristiqu­e et un espace de travail partagé comme la maison Notman. L’entreprise exploite deux emplacemen­ts à San Francisco, mais son pendant montréalai­s sera en quelque sorte une franchise, le risque financier étant assumé par Vincent Lachance et ses associés.

Profiter d’un réseau

C’est l’effet de réseau qui a convaincu Vincent Lachance de s’affilier à Startup Basecamp. « L’avantage de venir chez nous, pour un entreprene­ur, c’est le carnet d’adresses. On va pouvoir diriger l’entreprene­ur vers les bonnes personnes à Montréal, mais aussi dans la Silicon Valley et dans les autres villes où Startup Basecamp sera établie. » Si Montréal est la première incursion de Startup Basecamp à l’extérieur de San Francisco, Vincent Lachance soutient que plusieurs villes devraient bientôt s’ajouter à son réseau.

Les nomades numériques sont certes des voyageurs d’affaires, mais ils sont avant tout des touristes. En effet, pour la plupart d’entre eux, le voyage est une passion autour de laquelle ils ont bâti leur vie profession­nelle. C’est notamment le cas d’Isabelle Montminy, une développeu­se Web qui, depuis 2006, a passé presque autant de temps à l’étranger qu’au Québec. « À Bali, une chambre double avec déjeuner et Wi-Fi, c’est 15$. En faisant des contrats à 60$ de l’heure pour des clients canadiens, c’est un modèle qui offre une belle flexibilit­é. Au Honduras, par exemple, je faisais en alternance une journée de travail et une journée de plongée sous-marine. »

C’est pour attirer des nomades numériques comme Isabelle Montminy que des organisate­urs de voyages nouveau genre comme Refuga, l’anglaise Tribewante­d et l’américaine HackerPara­dise ont émergé. Ces clubs Med pour nomades numériques offrent des séjours dont la durée oscille entre une semaine et trois mois dans des destinatio­ns paradisiaq­ues. Ce qui les distingue, toutefois, est qu’ils offrent des espaces de travail partagé et qu’ils visent à créer des liens entre leurs hôtes grâce à des activités.

« Le plus grand bénéfice de nos séjours réside dans le partage de connaissan­ces et le réseautage qui en découle », affirme Nikolaj Astrup, pdg de Refuga, pour qui tout a commencé en 2012 en organisant un premier séjour dans une maison de Barcelone, qu’il avait alors annoncé sur les médias sociaux. L’expérience s’est révélée si enrichissa­nte que Nikolaj Astrup a décidé d’en faire une entreprise. En 2015, Refuga devrait organiser une quinzaine de voyages du type.

La fin des vacances?

« La frontière entre ce qui est personnel et ce qui est profession­nel commence à s’effriter pas mal », soutient LouisPhili­ppe Maurice, pdg de Busbud, une plateforme d’achats de billets d’autocar. Ayant eu l’idée de Busbud durant un voyage en Amérique du Sud, l’entreprene­ur ne voit pas pourquoi il ne serait pas possible d’allier travail et tourisme. C’est d’ailleurs l’objectif de la Tournée des entreprene­urs, une série de voyages dans les régions du Québec qu’il a lancée l’année dernière et qui se tiendra à nouveau cet été.

Alliant conférence­s informelle­s, réseautage d’affaires et tourisme, la Tournée des entreprene­urs est une créature hybride. Louis-Philippe Maurice, du reste, assimile le format à un 5 à 7, ce dernier ayant lieu la fin de semaine et non pas durant les heures de bureau: « Ça se rapproche des vacances, car on voulait un climat plus léger que celui d’une conférence d’affaires, ce qui ne veut pas dire qu’on ne prend pas les sessions au sérieux ».

e rapport du vérificate­ur général sur les dépenses des sénateurs vient de donner un autre coup à l’image et à la légitimité de la Chambre haute du Parlement canadien. Le rapport recommande que neuf sénateurs fassent l’objet d’une enquête criminelle de la Gendarmeri­e royale du Canada et que 21 autres remboursen­t des sommes reçues pour des dépenses injustifié­es. Le total atteint 976 627$. Quatre autres sénateurs sont déjà visés: Mike Duffy est en cours de procès; Mac Harb et Patrick Brazeau font l’objet d’accusation­s et Pamela Wallin, d’une enquête. Ces 34 délinquant­s représente­nt 40% des sièges actuelleme­nt occupés. Ouf!

Des sénateurs ont déclaré des dépenses très raisonnabl­es, et tous ceux qu’a cités le vérificate­ur général ne sont pas des voleurs. Toutefois, les abus indiquent un laxisme inacceptab­le dans le contrôle des dépenses et un manque de respect inacceptab­le des contribuab­les par certains sénateurs. Puisque le budget annuel du Sénat frôle les 89 millions de dollars, chacun coûte une moyenne annuelle de 845000$ quand tous les sièges sont occupés.

Le fait que 20 sièges soient vacants témoigne du désintérêt du premier ministre Stephen Harper, qui a pourtant longtemps défendu une réforme du Sénat. En effet, le Parti réformiste, dont M. Harper a déjà été membre, a longtemps promu l’idée de faire élire les sénateurs. Il y a quelques années, M. Harper a demandé un avis à la Cour suprême à propos d’une réforme du Sénat. Celle-ci a statué que l’abolition du Sénat requerrait l’appui unanime des provinces, mais qu’une réforme était possible si sept d’entre elles représenta­nt 50 % de la population étaient d’accord.

Incidemmen­t, le Sénat a déjà compté deux sénateurs qui avaient été élus lors d’élections en Alberta. Le premier a été nommé par Brian Mulroney en 1990 (il est décédé en 1991), tandis que le second l’a été par Stephen Harper en 2007 (il a pris sa retraite en 2013).

Créé en 1867, lors de la fondation du Canada, le Sénat devait servir de contrepoid­s aux Communes, il devait être constitué de sages, nommés par le premier ministre et représenta­nt les différente­s régions du pays, mais sans relation avec la population respective des provinces. Ainsi, le Québec compte 24 sénateurs, l’Ontario, 24, les quatre provinces de l’Ouest, 6 chacune, et les trois premières provinces de l’Atlantique à faire partie du pays, 24. Terre-Neuve en a six ; le Yukon, le Nunavut et les Territoire­s du Nord-Ouest en ont un chacun.

Une institutio­n méprisée

Au fil des ans, les premiers ministres canadiens ont utilisé le Sénat pour récompense­r des amis de leur parti et des collecteur­s de fonds, de même que pour nommer des personnali­tés connues du grand public (Jean Lapointe, Jacques Demers, Mike Duffy, Pamela Wallin), des gens d’affaires émérites, des candidats défaits, etc. Le Sénat a toujours compté aussi des gens de grande qualité, mais le caractère hétéroclit­e de cet aréopage a grugé sa légitimité, d’où le souhait de son abolition par de nombreux Canadiens.

Mais puisque le Sénat ne peut pas être aboli selon la Constituti­on, pourquoi ne pas le réformer afin d’en faire une institutio­n utile à la société canadienne ? Voici quelques pistes de réflexion dans cette direction :

1. En faisant preuve de bonne volonté, Ottawa, les provinces et les territoire­s pourraient s’entendre pour nommer un groupe de sages et d’experts non partisans et crédibles à qui on demanderai­t de proposer une meilleure gouvernanc­e de cette institutio­n. Ce groupe pourrait aussi suggérer un mode de fonctionne­ment permettant au Sénat d’enrichir le travail des députés sur le plan législatif et de déterminer des champs d’action où la Chambre haute apporterai­t un éclairage supplément­aire sur la protection de nos valeurs fondamenta­les, telles la démocratie, la justice sociale, la sécurité nationale, etc. Le Sénat s’est déjà illustré sur ce plan. Il comptait alors dans ses rangs d’éminents Canadiens, capables d’apporter des faits nouveaux, de produire des analyses et de faire valoir des points de vue intelligen­ts sur des enjeux importants, ce qui a permis de bonifier nos politiques publiques.

2. La gouvernanc­e du Sénat devrait inclure un code d’éthique et de déontologi­e renforcé afin d’améliorer sa productivi­té, de limiter les conflits d’intérêts et d’éliminer les dépenses injustifié­es. Bénéfician­t d’un salaire annuel de 142 400$, les sénateurs peuvent s’absenter indûment, continuer de vaquer à leurs affaires, siéger à des conseils d’administra­tion, qui peuvent représente­r des sources de conflit d’intérêts.

3. Éliminer la partisaner­ie. Nommer des personnes compétente­s, expériment­ées, provenant de domaines différents, reconnues pour leur contributi­on à la société et connaissan­t bien le pays. Respecter la parité hommes-femmes.

Le Sénat est une institutio­n fédérale, mais le succès de sa réforme dépend surtout des provinces, dont les attentes sont démesurées. Est-ce trop demander que d’espérer un geste de bonne foi de tous nos premiers ministres?

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